Par Terry Jo Bichell Edité par Professor Ed Wild Traduit par Michelle Delabye & Dominique Czaplinski

Nous savons que les neurones sont très importants dans le cadre de la maladie de Huntington. Mais, le cerveau possède d’autres types de cellules jouant “les seconds rôles”. De nouvelles recherches ont montré que les astrocytes peuvent mal se comporter dans le cadre de la maladie de Huntington, entraînant un dysfonctionnement des neurones.

Les cellules du cerveau ne sont pas toutes des neurones

Les neurones sont connus. Ils sont les stars du cerveau, attirant et obtenant toute l'attention. Nous savons que les neurones envoient et reçoivent des signaux électriques entre eux, et reçoivent tout le mérite de la formation des pensées et souvenirs. Toutefois, comme toute star de cinéma le sait, la cérémonie des Oscars serait impossible sans la présence d'un certain nombre d'autres acteurs cachés derrière les rideaux, travaillant, par exemple, sur les costumes, le maquillage et les décors.

Les neurones sont les cellules 'stars' du cerveau ... mais il ne faut pas oublier les autres cellules du cerveau, comme les astrocytes, qui ont des postes importants en arrière-plan.
Les neurones sont les cellules ‘stars’ du cerveau … mais il ne faut pas oublier les autres cellules du cerveau, comme les astrocytes, qui ont des postes importants en arrière-plan.

Les types de cellules jouant les seconds rôles dans le cerveau sont appelées les cellules gliales. Celles-ci ne réalisant pas de tours électriques fantaisistes, elles ne sont pas sur le devant de la scène, mais forment la ‘colle’ qui maintient le bon fonctionnement du cerveau. En effet, le mot ‘glia’ signifie, en fait, la colle. Un des principaux types de cellules gliales est l’astrocyte, cellule ‘étoile’. Elle est appelée ainsi car elle a une forme ressemblant vaguement à une étoile. Mais, mêmes si les astrocytes sont très importantes dans les coulisses pour l’ensemble du spectacle, on ne sait pas précisément ce qu’elles font pour que tout fonctionne correctement, notamment dans le cadre de la maladie de Huntington.

La maladie de Huntington et le striatum

La maladie de Huntington touche en particulier les neurones situés dans le striatum, partie du cerveau qui est importante pour les mouvements. Elle a pour conséquence le dépérissement, puis la disparition des neurones. On ne sait pas clairement comment la maladie cause des dommages aux neurones, ou pourquoi elle choisit ces neurones en particulier, mais il y a, à l’avance, quelques signes de troubles. Par exemple, les neurones striataux atteints de la MH agissent différemment ; ils sont plus excitables, d'une manière électrique. Franchement nerveux, en fait.

Et, les neurones striataux atteints de la MH ont un aspect un peu différent que celui prévu - ils ont de minuscules gouttes qui ne peuvent être vues que sous microscope. La mutation du gène, responsable de la maladie de Huntington, crée une protéine plus collante que la protéine huntingtine normale, laquelle s'agglutine en gouttes, appelées “inclusions”, donnant aux neurones striataux des tâches de rousseur, observées sous microscope. Ainsi, ces neurones agissent un peu différemment, se présentent un peu différemment, bien avant même qu'ils ne commencent à dégénérer.

L’étude des cellules microgliales dans le cadre de la MH

Dans une pré-étude, une autre équipe a montré que placer la mutation MH uniquement dans les astrocytes a pour conséquence le développement d’inclusions à l’intérieur de ceux-ci, comme dans les neurones, même si les cellules gliales sont un type de cellules complètement différent. Encore plus surprenant, placer la mutation MH uniquement dans les astrocytes a pour conséquence la dégénérescence des neurones voisins n’ayant pas la mutation MH ! Ceci a suggéré que les astrocytes effectuent quelque chose d’important pour maintenir les neurones voisins en vie, même ceux en bonne santé. D’une certaine manière, la mutation MH interfère avec la capacité des astrocytes à maintenir les neurones en bonne santé.

Dans le nouvel article, Sorfoniew et Khakh ont utilisé deux modèles murins MH différents pour explorer l’histoire de l’astrocyte. Dans ces deux modèles, ils ont constaté que les mutations MH ont eu pour conséquence des dysfonctionnements des astrocytes, électriquement. Ces derniers sont, en fait, devenus très nerveux mais uniquement dans le striatum – pas dans d’autres parties du cerveau. C’était important pour la trame de l'histoire, car ceci a montré que les astrocytes ont été affectés par la mutation MH avant d’entraîner la mort des neurones.

Astrocytes, aspiration du potassium avec Kir4.1

L’excitabilité est bonne chez les stars de cinéma, mais ne l’est pas dans le cerveau. Trop d’excitabilité peut, en réalité, causer une forme d’épuisement neuronal, ce qui mène à la mort neuronale. Une chose rendant les neurones excitables : le potassium en roue libre. Le potassium supplémentaire doit être évacué des neurones, comme la fumée dans un bar bondé, ou bien il rendra les neurones trop excitables.

Les astrocytes à la rescousse ! Ceux-ci possèdent une protéine ‘canal’ spéciale, un peu comme un ventilateur d’extraction, qui aspire le potassium hors de l’espace situé entre les cellules. Ce canal a un nom de scène accrocheur : Kir4.1. Les astrocytes ayant la mutation MH ont moins de Kir4.1 qu’on s’y attendait. Cela signifie qu’ils ne peuvent pas supprimer le trop de potassium d’entre les cellules. C’est comme si les neurones faisaient la fête dans une salle enfumée privée de ventilateur et deviennent progressivement de plus en plus malades.

La protéine Kir4.1 de l'astrocyte fonctionne comme un ventilateur d'extraction, supprimant l'excès de potassium autour des neurones et les aidant à ne pas devenir trop excités.
La protéine Kir4.1 de l'astrocyte fonctionne comme un ventilateur d'extraction, supprimant l'excès de potassium autour des neurones et les aidant à ne pas devenir trop excités.

Recharger Kir4.1

Les chercheurs se sont demandés ce qui se passerait s’ils mettaient plus de Kir4.1 dans les astrocytes situés dans le striatum. Cela supprimerait-il l’excès de potassium et aiderait les neurones à rester en bonne santé ? Il ont trouvé une voie pour délivrer Kir4.1 dans les astrocytes de souris vivantes. Pas dans leurs neurones, juste dans leurs astrocytes. Effectivement, le ventilateur d’extraction a été restauré et l’excès de potassium a été supprimé, permettant aux neurones de ces souris de se calmer et d’arrêter d’être aussi excités.

Ces modifications cellulaires ont été très prometteuses, mais qu’en est-il sur l’animal en entier ? Il est important de savoir si le traitement seul des astrocytes pourrait, en fait, aider les souris MH à rester en bonne santé et à vivre plus longtemps. Après avoir administré des protéines Kir4.1 supplémentaires aux astrocytes, les souris n’ont pas semblé aller sensiblement mieux au cours de tests portant sur les mouvements et l’agilité, mais elles ont une démarche tendant à être plus normale. Ainsi, le traitement des astrocytes, les ‘acteurs de soutien’, ont en quelque sorte amélioré un des symptômes moteurs.

Le plus important : les souris traités ont vécu plus longtemps. Beaucoup plus longtemps. Ainsi, même si leurs symptômes moteurs ne se sont pas sensiblement améliorés, le traitement des astrocytes a permis au souris MH de vivre plus longtemps.

Un rôle de premier plan dans la maladie de Huntington pour les astrocytes

Ces expériences sont vraiment intéressantes car elles ont montré que les astrocytes pourraient avoir plus qu'un rôle de premier plan qu'on ne le pensait. Des traitements axés peut-être uniquement sur les neurones pointaient la caméra dans la mauvaise direction.

Il reste beaucoup de points à étudier dans cette histoire, donc une suite est attendue. Cette étude n'a pas expliqué comment la mutation du gène MH cause des problèmes dans les astrocytes ou comment il a réduit Kir4.1. Elle n'a pas non plus expliqué comment le traitement Kir4.1 a permis aux souris de vivre plus longtemps, en dépit du fait que la plupart de leurs symptômes moteurs n’ont pas été améliorés. Cette étude a utilisé des souris avec des mutations MH extrêmes qui pourraient ne pas faire les mêmes choses que les mutations des gènes humains. Mais, cette étude a changé le fil de l'histoire et a mis des acteurs de second rôle en premier plan. Elle a donné aux astrocytes le premier rôle. Le prochain épisode sera très intéressant.

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