Ed WildPar Professor Ed Wild Edité par Dr Jeff Carroll Traduit par Michelle Delabye & Dominique Czaplinski

Le premier de nos comptes-rendus spéciaux sur la conférence thérapeutique annuelle sur la MH à Palm Springs – la plus grande réunion de scientifiques MH axée sur le développement de traitements aux fins d’empêcher l'apparition de la maladie de Huntington ou de ralentir son évolution.

Lundi soir : introductions

Lors de la séance introductive, la fondation CHDI présente une mise à jour de ses travaux portant sur le développement de thérapies pour la maladie de Huntington http://chdifoundation.org/.

Le directeur scientifique de la fondation CHDI compare " de  l'approche au développement de traitements pour la MH " à "de la soupe aux noix".
Le directeur scientifique de la fondation CHDI compare “ de l'approche au développement de traitements pour la MH ” à “de la soupe aux noix”.

Le coup d’envoi est donné par le Dr Robert Pacifici, directeur scientifique de la fondation CHDI. La fondation CHDI est une fondation à but non lucratif visant à développer rapidement des traitements pour empêcher l'apparition de la maladie de Huntington ou ralentir son évolution. Dans la mesure où la fondation CHDI est une fondation sans but lucratif, elle n'a pas à rendre des comptes aux actionnaires, ce qui lui permet de se concentrer sur une seule maladie : la maladie de Huntington. La fondation CHDI a pour partenaires des chercheurs universitaires, des organismes de recherche privés et des compagnies pharmaceutiques aux fins de faire progresser la recherche dans le cadre de la MH sur autant de fronts que possible.

Pacifici compare “de la stratégie scientifique à la recherche thérapeutique” à “de la soupe aux noix” de la fondation CHDI (l’expression “de la soupe aux noix” signifie “du début à la fin”, en relation avec un repas : entrée, plat et dessert. L'entrée est ici la soupe et le dessert, les noix. Nous ne savons pas qui termine le repas avec des noix ici). Une part importante des travaux de la fondation CHDI est constituée par la répétition de travaux menés par d’autres chercheurs. S’il y a des différences de résultats, une nouvelle réflexion peut-être nécessaire. Cette “duplication” est une part importante de la science mais souvent négligée car elle n’est pas très glamour. Ce que réalise la fondation CHDI est remarquable.

Les programmes de la fondation CHDI comprennent la réduction de l’expression de la huntingtine, l’activation de TrKB, l’inhibition de KMO, les inhibiteurs de la phosphodiestérase et autres. Pacifici : “la fondation CHDI a de quoi être fière, mais davantage de travaux importants sont à réaliser avant que nous puissions répondre aux besoins non satisfaits de nos patients”.

Le Dr Cheryl Fitzer-Attas, Vice-Président de CHDI, présente les efforts de la fondation axés sur les patients. De nouvelles collaborations CHDI comprennent la technologie portable et l’analyse automatique de la parole aux fins d’étudier la progression de la maladie de Huntington. La fondation CHDI met beaucoup d’efforts à développer les meilleurs outils pour évaluer les signes et les symptômes de la MH, afin qu’ils soient utilisés dans des essais cliniques.

PEARL-HD est une étude, financée par CHDI, portant sur le scanner cérébral, utilisant des scanners cérébraux spéciaux pour aider à tester les médicaments inhibiteurs de la phosphodiestérase. Pensant à l’avenir, CHDI étudie “le fardeau de la maladie” – très utile pour faire en sorte que les systèmes de soins paient pour de nouveaux médicaments. Résultat : les soins aux patients MH sont très coûteux, de sorte que si de nouveaux médicaments peuvent améliorer les choses, les compagnies d’assurances et les prestataires de santé économiseront de l’argent.

L’étude clinique la plus importante de CHDI est Enroll-HD, visant à permettre la recherche clinique, à comprendre la MH et à améliorer les soins cliniques.

Mardi matin : connexions

Hongwei Dong utilise un incroyable microscope et des techniques informatiques pour cartographier un milliard de milliards de connexions entre les cellules du cerveau. Son magnifique travail peut être vu ici : http://www.mouseconnectome.org/gallery/. Aucune cellule du cerveau n’est une île ; les connexions entre les cellules du cerveau sont l’endroit critique où celles-ci effectuent leurs calculs. En utilisant des souris normales, l’équipe de Dong a cartographié des connexions entre deux parties importantes du cerveau, le cortex et le striatum, les parties du cerveau les plus affectées dans le cadre de la maladie de Huntington ; ces types de cartes pourraient être un outil utile pour comprendre la maladie. L’équipe de Dong travaille maintenant avec des souris MH et les compare aux souris normales. Ils ont constaté une détérioration de la communication entre ces zones.

Myriam Heiman s’est intéressée à l’étude des différents types de cellules composant le striatum, la partie vulnérable du cerveau dans le cadre de la maladie de Huntington. Dans le cerveau, toutes les cellules ne meurent pas au même rythme – si nous pouvons comprendre pourquoi, nous pourrions être en mesure d’apprendre quelques astuces propres aux cellules protégées. Le laboratoire de Heiman a développé une nouvelle technique, appelée SLIC, aux fins d’étudier les fonctions des gènes individuels dans le cerveau de souris vivantes. Sa technique permet d’étudier un million de cellules lors de chaque expérience, de sorte qu’ils peuvent étudier les effets de nombreux gènes lors de chaque expérience. Lorsqu’ils ont supprimé un gène, appelé Gpx6, les cellules MH du cerveau sont mortes.

«Nous avons davantage de travaux importants à réaliser avant de pouvoir répondre aux besoins non satisfaits de nos patients. »

Ceci suggère que quelque soit l'action de Gpx6 celle-ci est utile pour les cellules MH. Les fonctions de Gpx6 au sein du cerveau sont peu connues ; en conséquence, l’équipe de Heiman s’emploie à comprendre le rôle de ce gène. Ce type de travaux est un important moyen de générer de nouvelles pistes – si nous pouvons trouver des moyens pour dynamiser l’activité de Gpx6, nous pourrions protéger les cellules MH du cerveau. Compte tenu de ce succès, l’équipe de Heiman étend son étude pour examiner un plus grand nombre de gènes. Quelles sont les autres cibles à explorer ?

Juan Botas, de Baylor, utilise des mouches des fruits pour étudier la maladie de Huntington ! Pourquoi utiliser des mouches ? Elles sont bon marché, se reproduisent rapidement et nous permettent de réaliser des études rapides. Les scientifiques MH ont généré tellement de données qu’il est difficile de connaître quels changements, se produisant dans le cadre de la maladie de Huntington, sont une cause importante de la maladie. Certains changements, qui se produisent au cours de l’évolution de la maladie, pourraient, en fait, être des tentatives de l’organisme pour se protéger, ce que nous ne voulons pas supprimer. Compte tenu de l’énorme quantité de données dont il faut assurer le suivi, l’équipe s’est tournée vers de petites mouches des fruits afin de savoir si chaque changement est bon, mauvais, ou indifférent. Dans la mesure où les mouches n’ont pas normalement la MH, l’équipe de Botas a modifié génétiquement une souche – en lui administrant le gène MH muté. Les mouches ayant le gène MH muté présentent un certain nombre de changements – elles ont même des problèmes moteurs, devenant plutôt maladroites par rapport aux mouches normales.

Dans la mesure où de nombreux scientifiques travaillent sur les mouches des fruits, un très grand nombre de gènes génétiquement modifiés sont disponibles pour des études. L’équipe de Botas est en mesure d’utiliser des mouches ayant des copies supplémentaires, ou en moins, d’un très grand nombre de gènes, les reproduisant avec leurs mouches des fruits atteintes de MH. Ces mouches hybrides permettent à l’équipe de comprendre quels changements sont une partie du problème dans la MH et ceux qui pourraient être des réponses protectrices. Maintenant, Botas s’emploie à valider les conclusions de son équipe obtenues avec les mouches pour les cellules du cerveau humain, dans la mesure où, bien entendu, personne n’est intéressé par le traitement des mouches !

Jong-Min Lee, Massachusetts General, présente ses travaux portant sur les modificateurs génétiques de la maladie de Huntington. Les modificateurs génétiques sont des variations génétiques naturelles entre des individus, pouvant accélérer ou ralentir la progression de la maladie de Huntington. L’étude des variations génétiques nous permet de comprendre “les expériences de Dame Nature sur les humains”. La technologie nous permet d’étudier l’ensemble du génome pour rechercher des gènes modificateurs de la MH. Ces études sont appelées études d'association pangénomique (GWAS). Si vous avez beaucoup d’échantillons d’ADN, il est facile de trouver des gènes modificateurs “candidats”. Prouver quels gènes précis affectent la MH est le plus délicat.

Un problème : l’ADN est transmis de génération en génération en gros morceaux ; les meilleures technologies ne font que souligner des régions générales. Une fois que l’étude GWAS a mis en évidence une région de l’ADN qui semble être liée à la progression de la MH, le plus difficile est de prouver quel est le gène important. En utilisant 8 000 échantillons provenant de patients MH, deux gènes modificateurs candidats ont été trouvés sur le chromosome 15 (un chromosome est une des 46 bâtonnets d’ADN qui composent notre génome). Il existe un autre modificateur génétique candidat sur le chromosome 8 et un autre sur le chromosome 3. La modification génétique candidate sur le chromosome 15 a l’effet équivalent de changer l’âge d’apparition de la MH de près de six ans.

Bien entendu, nous ne pouvons pas modifier l’ADN des individus mais peut-être que nous pourrions développer des médicaments pour imiter naturellement des variations génétiques protectrices ou bloquer les mauvaises. Un candidat pointe sur un problème ayant trait au mécanisme cellulaire utilisé pour réparer l’ADN endommagé. Lee et son équipe sont en train de faire le plus difficile – l’examen de tous les gènes individuels dans les zones candidates afin de comprendre ceux qui sont importants. Cela implique beaucoup de travail compliqué en laboratoire en utilisant des cellules et d'autres modèles MH afin de voir si des gènes modificateurs affectent la maladie.

Jim Rosinski, CHDI, est un bioinformaticien. Il aide la fondation à comprendre et à utiliser l’énorme quantité de données générées par celle-ci. Il est facile pour des scientifiques de mener des expériences aboutissant à des ensembles massifs de données, lesquels sont difficiles à utiliser par la moyenne des scientifiques. La fondation CHDI a généré une quantité massive d’évaluations portant sur des modèles animaux MH et rend ces données disponibles pour tout le monde. L’équipe de Rosinski a examiné un certain nombre d’organes chez les souris MH, en plus du cerveau, et a trouvé un nombre surprenant de changements. Des tissus, comme le foie, et le tissu adipeux présentent un certain nombre de changements précoces, suggérant que la MH a des effets partout.

La fondation CHDI analyse tous ces changements avec un certain nombre d’experts informaticiens, essayant un éventail d’approches de modélisation pour expliquer les données. Les résultats de l’un de ces efforts commencent à permettre aux scientifiques d’effectuer des prédictions, qu’ils testent maintenant en laboratoire. CHDI a mis à disposition toutes les données qu’elle a générées sur un site internet : http://HDinHD.org, que tout scientifique intéressé peut télécharger.

Mardi après-midi : énergie

Le Dr Cheryl Fitzer-Attas, Vice-Président de CHDI, présente les efforts de la fondation axés sur les patients.
Le Dr Cheryl Fitzer-Attas, Vice-Président de CHDI, présente les efforts de la fondation axés sur les patients.

La séance de cet après-midi est axée sur le problème “d’énergie” dans la maladie de Huntington ; les cellules des individus MH et des animaux MH semblent produire inefficacement l’énergie.

Michael Orth décrit les travaux d’un groupe de chercheurs travaillant sur un projet intitulé “signatures moléculaires multi-tissus dans la MH”. L’équipe a isolé des cellules musculaires, des cellules de la graisse et de la peau provenant d’un vaste groupe de porteurs de la mutation MH, essayant de cartographier en détails leur consommation d’énergie. Orth rapporte qu’il existe des changements dans les mitochondries (les centrales électriques de la cellule) au sein des cellules musculaires de patients MH. Ces changements ont été particulièrement visibles lorsque les cellules ont été stressées par des traitements chimiques qui “stressent” les mitochondries.

Ensuite, Martin Brand de l’Institut Buck expose davantage à propos de l’énergie et des mitochondries dans le cadre de la maladie de Huntington. Il étudie en laboratoire l’action de mitochondries extraites de modèles murins MH. Après avoir étudié attentivement les mitochondries, il n’a constaté aucune différence dans la façon dont se comportent les mitochondries chez les souris MH. Ceci est surprenant dans la mesure où de scientifiques précédents ont constaté des anomalies dans le fonctionnement mitochondrial.

Par la suite, Brand a étudié les taux de “dérivés réactifs de l’oxygène” dans des cellules de cerveaux de souris MH. Les dérivés réactifs de l’oxygène sont des substances chimiques qui peuvent endommager les cellules en réagissant avec elles (les antioxydants sont des substances chimiques qui protègent les cellules contre ces dérivés réactifs de l’oxygène). Les dommages causés par des dérivés réactifs de l’oxygène ont été suggérés comme étant l’une des causes des dommages dans le cadre de la MH et les antioxydants ont été suggérés comme étant une possible thérapie. De manière inattendue, les cellules porteuses de la mutation MH ont semblé avoir une MEILLEURE résistance aux dérivés réactifs de l’oxygène. Il s’agit d’un résultat très inattendu - vous pouvez parier que de nombreux scientifiques se grattent la tête à ce sujet.

Doug Rothman, Yale, utilise des appareils IRM pour analyser la consommation d’énergie dans les cerveaux de souris vivantes et d’individus. Dans ces études, des volontaires reçoivent des injections de sucre chimiquement modifié, permettant aux scientifiques de tracer le sort de ce sucre dans le cerveau. Cette technique leur permet de surveiller en temps réel le sucre, de sorte qu’ils peuvent voir comment les cerveaux MH produisent et utilisent l’énergie. Nos cerveaux utilisent constamment une quantité énorme de sucre – selon que nous sommes activement ou non engagés dans une tâche. L’équipe de Rothman observe de grands changements dans les taux de consommation de sucre dans les cerveaux des souris MH. Ces types d’évaluation utilisés par l’équipe de Rothman peuvent être facilement utilisés chez les patients MH humains.

Ryan Michalek, Metabolon, se spécialise dans l’évaluation des concentrations de milliers de substances chimiques composant les cellules. Il utilise des modèles animaux MH à la recherche de modèles communs du changement chimique. Parmi des milliers de substances chimiques et réactions qui font que les cellules fonctionnent, il en a découvert des douzaines qui sont altérées dans le cadre de la maladie de Huntington.

Les entretiens de l’après-midi ont ajouté une quantité énorme d’informations à ce que nous savions déjà sur la façon dont les tissus MH sont différents des tissus normaux.

Larry Park, CHDI, résume les discussions et les controverses de cette journée. En particulier, de bons indices soutiennent l’idée que le stress oxydatif fait partie de la maladie de Huntington. La fondation CHDI étudie une protéine appelée Nrf2, régulatrice principale de la cellule pour répondre aux dommages oxydatifs, aidant les cellules à canaliser leurs défenses en réponse aux dommages.

Dr Wild et Dr Carroll ont reçu le soutien de l’organisateur de la conférence CHDI Fondation pour leurs recherches. Pour plus d'informations sur notre politique d'information voir notre FAQ ...