Par Dr Leora Fox et Dr Rachel Harding Edité par Dr Jeff Carroll Traduit par Michelle Delabye & Dominique Czaplinski

Le 21 juin, les compagnies PTC Therapeutics et UniQure ont partagé des mises à jour s’agissant de leurs essais cliniques respectifs, testant tous deux la diminution de la huntingtine comme approche pour traiter la maladie de Huntington mais avec des différents types de thérapies. Dans cet article, nous passons en revue les données qu’elles ont chacune présentées, ce que cela signifie et les prochaines étapes que les compagnies envisageront.

Traitement de la maladie de Huntington avec la diminution de la huntingtine

Les approches des compagnies PTC et UniQure pour le traitement de la maladie de Huntington s’appuient sur les bases de la génétique MH. Un gène, appelé Huntingtin, devient expansé, conduisant à une protéine extra-longue, censée causer des dommages aux cellules cérébrales. Des dizaines de compagnies pharmaceutiques et biotechnologiques travaillent sur des thérapies qui tentent de diminuer la quantité de cette protéine huntingtine longue et défectueuse, une approche connue sous le nom de diminution de la huntingtine. Les compagnies PTC et UniQure sont deux de ces compagnies qui ont des essais cliniques en cours dans ce domaine, bien que leurs approches soient assez différentes.

Le PTC-518 est un type de médicament, appelé modulateur d'épissage, qui peut être administré par voie orale.
Le PTC-518 est un type de médicament, appelé modulateur d'épissage, qui peut être administré par voie orale.

La compagnie PTC Therapeutics : s’attaquer aux gènes en avalant une pilule

La plupart des médicaments, diminuant la huntingtine, en cours de développement visent l’intermédiaire entre le gène et la protéine, un message génétique connu sous le nom d’ARN. Le médicament de la compagnie PTC, PTC-518, effectue une étape complexe de copier-coller, de sorte que maintenant l’intermédiaire contient un panneau stop. La machinerie cellulaire voir le panneau stop et décide de ne pas continuer à produire la protéine.

Ce type de médicament est connu en tant que modulateur d’épissage, et l’un des principaux avantages de cette approche est que celui-ci peut être administré par voie orale. Sur la base de données issues d’animaux, nous savons que le médicament PTC-518, administré oralement, peut atteindre de nombreuses parties du cerveau et du corps sans procédures invasives, telle que l’injection rachidienne ou une chirurgie cérébrale. PTC-518 cible à la fois les formes expansées et régulières de la huntingtine, de sorte que les deux versions de la protéine sont réduites après un traitement avec ce médicament.

UniQure : une thérapie unique pour réduire la huntingtine, pour toujours ?

Nous avons déjà publié à plusieurs reprises s’agissant de l’approche unique de la compagnie UniQure pour traiter la maladie de Huntington, la première du genre. Les thérapies géniques opèrent un changement fondamental dans la génétique d’une personne pour essayer de traiter ou de soigner une maladie. Bien que ciblant toujours la molécule de message génétique, l’approche de la compagnie UniQure, avec leur médicament AMT-130, est assez différente de celle de la compagnie PTC.

L’AMT-130 est un matériel génétique, créé par l’homme, emballé dans un virus vide et inoffensif, délivré aux parties profondes du cerveau via une intervention chirurgicale. L’idée est que cette procédure unique puisse permettre à la thérapie de se propager dans de nombreuses cellules cérébrales, créant de petites usines qui continueront à produire un « antidote » génétique pendant de nombreuses années. Cela pourrait empêcher l’ARN messager huntingtin de produire autant de protéine hutingtine dans chaque cellule cérébrale que l’AMT-130 pénétrerait.

Mise à jour de la compagnie PTC Thérapeutics

Un pivot pour l’étude PIVOT-HD

HDBuzz a publié sur le début, ainsi que sur les mises à jour, de l’essai en cours portant sur le médicament PTC-158, alors récapitulons. Cet essai, d’une durée d’environ trois mois, était conçu pour impliquer environ 160 participants sur des sites aux Etats-Unis, Canada, Europe et Australie. Les participants recevraient le placebo ou le PTC-158 par voie orale selon quelques doses différentes (5 mg ou 10 mg) et se rendraient sur les sites d’étude pour des évaluations liées à la sécurité, aux effets secondaires, aux taux de huntingtine dans le sang, et des tests liés à leurs mouvements, leur humeur et leur capacité de réflexion. Ceux qui ont terminé l’étude auraient la possibilité de s’inscrire à une étude d’extension ouverte dans laquelle tout le monde reçoit le PTC-158 et continue d’avoir des visites d’étude périodiquement.

Un aspect unique de cet essai est qu’il était conçu pour des personnes présentant des signes très précoces de la MH, potentiellement avant même qu’elles ne présentent des symptômes moteurs ou des changements majeurs dans leurs capacités au quotidien. Mais à mi-chemin, la compagnie PTC a annoncé quelques changements. Ils ont décidé d’élargir l’étude afin d’inclure des personnes présentant des symptômes moteurs mesurables et des difficultés précoces s’agissant des tâches quotidiennes, parfois connu sous le nom de « maladie de Huntington manifeste ». Ils ont, en outre, étendu la durée de l’essai en passant de trois mois à douze mois. Il y a eu, du fait de cet allongement, des retards dans l’obtention de l’approbation de la FDA, de sorte que le recrutement pour l’essai a été suspendu aux Etats-Unis mais s’est poursuivi comme prévu ailleurs. Nous avons davantage publié sur ces annonces au mois de novembre 2022.

«Les niveaux de huntingtine ont été réduits chez les personnes ayant reçu du PTC-518 »

Les données partagées de l’étude PIVOT-HD montrent que le médicament PTC-158 diminue les taux de huntingtine

La compagnie PTC a annoncé, en même temps qu’elle partageait ces changements s’agissant de l’essai, qu’elle partagerait les données de la première période de trois mois de l’étude au cours du premier semestre 2023. Une information utile : lorsqu’une compagnie annonce son intention de fournir des nouvelles pendant une fenêtre de temps particulière, généralement, c’est lors de la dernière partie de cette fenêtre de temps, en l’espèce à la fin du mois de juin 2023.

La compagnie PTC a tenu une réunion avec les investisseurs et a publié une déclaration partageant, à ce jour, leurs conclusions sur l’essai PIVOT-HD. L’une des principales conclusions à ce stade : les taux de huntingtine ont été réduits chez les personnes ayant reçu le médicament PTC-158 et le groupe ayant reçu une dose élevée du médicament présentait une réduction plus importante de leurs taux de huntingtine. Il s’agit d’une nouvelle positive dans la mesure où elle suggère que l’effet sur les taux de huntingtine dépend de la dose, c’est-à-dire que plus vous administrez de médicament, plus l’effet sera important ; ce qui aidera à guider les futures stratégies de dosage si cela peut nécessiter des ajustements dans les phases ultérieures des essais cliniques.

L’essai a évalué les taux à la fois du message génétique et de la molécule de protéine huntingtine elle-même dans des échantillons sanguins de participants. Il y avait un bon accord entre les deux évaluations, ce à quoi nous nous attendions en fonction de la façon dont agit le médicament en ciblant le message génétique ; c’était donc une découverte encourageante.

Le médicament PTC-158 peut passer du sang au système nerveux central

Une inquiétude commune aux médicaments administrés par voie orale conçus pour traiter des troubles cérébraux, est qu’il peut être très difficile pour ces molécules de passer du système sanguin au système nerveux central. Dans l’étude de données présentée, la compagnie PTC a évalué les taux du médicament dans le système sanguin et le liquide céphalo-rachidien et a constaté que PTC-158 pénètre effectivement dans le liquide céphalo-rachidien entourant le cerveau. L’équilibre des taux de médicament dans le sang et le liquide céphalo-rachidien était assez égal, ce qui est une bonne nouvelle, bien que cela ne nous donne pas d’information sur la question de savoir si le médicament est capable d’atteindre les régions cérébrales importantes dans le cadre de la MH, telles que le striatum, ce que la compagnie PTC espère cibler.

Le traitement avec PTC-158 apparaît être bien toléré

Une autre lecture de la santé du cerveau sont les taux d’une protéine appelée NfL. Les taux de NfL augmentent lorsque le cerveau est malade et il est bien documenté que les taux de NfL augmentent chez les personnes atteintes de la MH au fil du temps, à mesure que le maladie progresse. La compagnie PTC a évalué les taux de NfL dans le liquide céphalo-rachidien des participants à l’essai et a constaté de légères diminutions chez les personnes traitées avec chaque dose du médicament, en comparaison au placebo. Il s’agit d’une bonne nouvelle car d’autres essais portant sur la diminution de la huntingtine ont, en fait, constaté des pics ou des niveaux accrus de NfL. Cependant, les données sont assez variables et ne proviennent que d’une courte durée de traitement ; on ne sait pas avec exactitude à quel point cette diminution est significative, jusqu’à ce que davantage de personnes soient traitées plus longtemps.

Mise à jour de la compagnie UniQure

AMT-130 est une thérapie génique unique administrée par chirurgie cérébrale
AMT-130 est une thérapie génique unique administrée par chirurgie cérébrale

Les essais HD-Gene-TRX jusqu’à présent

Compte tenu de la nouveauté de la thérapie génique MH, les essais cliniques actuels portant sur l’AMT-130 en sont aux premiers stades et visent à garantir la sécurité. Dans plusieurs petits essais cliniques aux Etats-Unis et en Europe, seules environ 40 personnes présentant des symptômes précoces de la MH ont subi une intervention chirurgicale, jusqu’à 26 aux Etats-Unis et 15 en Europe.

Une faible et une forte dose du médicament AMT-130 sont testées dans cet essai. Quelques-unes des interventions chirurgicales étaient « fictives », sans administration du médicament, en tant que groupe de comparaison. Les participants sont suivis très attentivement pendant quelques semaines après l’intervention, puis de près pendant une année avec des visites moins fréquentes jusqu’à cinq ans. Ils vont à des visites d’étude et effectuent des analyses de sang, des examens neurologiques, et des évaluations de leur maladie, telles que des tests moteurs et cognitifs.

Au mois de juin 2022, la compagnie UniQure a partagé quelques premières données provenant de la première cohorte de dix personnes du groupe à faible dose – ils n’ont observé aucun problème de sécurité majeur, et les taux de huntingtine, bien que mesurables chez un très petit groupe, avaient tendance à diminuer.

Puis, au mois d’août, des effets secondaires neurologiques dangereux ont été rapportés à la suite de trois des interventions chirurgicales à haute dose, entraînant une courte pause. Ceux-ci ont été résolus pour l’ensemble des participants, de sorte qu’au mois de novembre, de nouvelles interventions chirurgicales ont pu à nouveau aller de l’avant avec la mise en place d’une surveillance supplémentaire.

Ce que nous avons appris à ce jour s’agissant de l’AMT-130

Depuis le mois de novembre dernier, nous avons attendu avantage de données de la part de la compagnie UniQure sur l’essai en cours portant sur l’AMT-130, attendues au mois de juin. Cette publication comprend deux ans de données provenant de la première cohorte à faible de dose de dix personnes, et une année de données provenant de la seconde cohorte à forte dose de 16 participants américains.

La bonne nouvelle de la compagnie UniQure est que le pic de NfL, qui se produit après l’intervention chirurgicale administrant le médicament, semble revenir près de la ligne de base après environ 18 mois et aucune autre augmentation n’est observée. Le changement des niveaux de NfL par rapport aux contrôles à long terme n'est pas encore vraiment clair. Aucun changement significatif n'a été observé dans le volume total du cerveau, ce qui est positif.

S’agissant des symptômes, la compagnie UniQure a rapporté plusieurs évaluations effectuées chez les patients traités. Cela comprend un ensemble d’évaluations prenant en compte différents aspects du mouvement d’une personne, appelé le score moteur total. Par rapport à la trajectoire attendue de ces changements moteurs, les patients traités avec le médicament AMT-130 semblent aller un peu mieux sur 18 mois.

«Les patients traités avec l'AMT-130 semblaient montrer une certaine stabilisation de leur capacité fonctionnelle totale. »

Une évaluation appelée la capacité fonctionnelle totale englobe la façon dont les personnes s’en sortent dans leurs tâches de la vie quotidienne. Les patients traités au AMT-130 semblaient présenter une stabilisation de cette évaluation, laquelle comprend des jalons tels que la poursuite du travail, la capacité à gérer les finances du ménage, etc… Conformément à cela, les tests formels sur la capacité des gens à penser de manière flexible semblaient également se stabiliser, par rapport à la trajectoire attendue pour les patients MH.

Cependant, certaines des données partagées par la compagnie UniQure sont un peu déroutantes à comprendre. Lorsqu’ils ont examiné les taux de huntingtine dans le liquide céphalo-rachidien, ceux-ci avaient diminué dans le groupe à faible dose mais avaient augmenté dans le groupe à dose élevée, et ce, en examinant les moyennes du groupe. Cela pourrait être dû à un ensemble de données corrompues chez un petit nombre de participants, ou peut-être à un problème technique avec les évaluations des taux de huntingtine, mais cela n’est pas encore connu.

Il convient de rappeler qu’avec le médicament AMT-130, en particulier, il est requis une extrême prudence et sur le terrain, nous chevauchons une division délicate. D’une part, nous voulons avoir un plus grand nombre de personnes traitées avec le médicament AMT-130 afin que nous puissions voir des changements solides dans les évaluations effectuées sur les sujets. Mais, rappelons qu’il s’agit d’une toute nouvelle thérapie génique avec un virus qui ne peut pas être désactivé. La compagnie UniQure et les autorités de règlementation doivent marcher sur la corde raide entre le recrutement d’un nombre suffisant de personnes pour générer de solides données et la sécurité des patients.

En conclusion et la suite

Suite à plusieurs résultats décevants d’essais provenant d’autres compagnies testant les thérapies de diminution de la huntingtine, il est encourageant de voir les progrès de deux approches différentes.

Les données présentées par la compagnie PTC sont globalement encourageantes et montrent que le médicament semble agir afin de diminuer les taux de huntingtine, comme prévu, avec des effets secondaires minimes. Il est important de noter que cet essai est actuellement très petit – les données d’un total de seulement de 22 personnes ont été rapportées dans cette mise à jour particulière. Il reste à voir comment ses résultats pourraient changer dans une étude avec une cohorte plus importante. Nous ne savons pas non plus si la diminution de huntingtine observée entraînera un arrêt ou un ralentissement des symptômes chez les personnes atteintes de la MH. La compagnie PTC a déclaré dans cette mise à jour qu’elle utilisera les données y présentées pour argumenter auprès de la FDA afin que le recrutement de l’essai soit relancé sur les sites aux Etats-Unis où il avait été précédemment interrompu. Ils vont également continuer le recrutement dans leurs sites européens.

Bien que les données de la compagnie UniQure ne soient pas nécessairement décevantes, elles ne sont franchement pas claires non plus. C’est souvent le cas avec de petits essais où la variabilité est élevée entre les participants, il peut donc être difficile d’essayer de déterminer si un médicament a l’effet désiré. La compagnie UniQure prévoit de poursuivre le recrutement pour leur essai, à la fois aux Etats-Unis et en Europe, dont le premier étudiera également le traitement de l’AMT-130 et des stéroïdes en même temps afin, espérons-le, de réduire certains des effets secondaires observés avec ce médicament.

Nous vous tiendrons informés sur tous les fronts au fur et à mesure que les choses évoluent.

Leora Fox travaille au sein de la Huntington's Disease Society of America, laquelle entretient des relations et des accords de non-divulgation avec des sociétés pharmaceutiques, notamment uniQure et PTC. Rachel Harding et Jeff Carroll n'ont aucun conflit d'intérêts à déclarer. Pour plus d'informations sur notre politique d'information voir notre FAQ ...