L’injection d’une 'graisse' spéciale du cerveau aide les souris.
L’injection directe d’un bon type de graisse, GM1, dans les cerveaux des souris MH procure un avantage considérable.
Par Dr Jeff Carroll 23 février 2012 Edité par Professor Ed Wild Traduit par Michelle Delabye & Dominique Czaplinski Initialement publié le 14 février 2012
Le cerveau humain est enrichi de nombreux types différents de graisses. Certaines de ces molécules graisseuses sont réduites dans la M.H., et une nouvelle étude démontre que restaurer les niveaux de GM1, un type spécifique de graisse, conduit à des améliorations spectaculaires du comportement des souris MH.
Les molécules de graisse et le cerveau
‘Graisse’ est un terme général ayant mauvaise réputation. Mais le mot décrit essentiellement des substances graisseuses présentes dans les cellules et l'organisme. La biologie de la graisse est, en fait, plutôt compliquée - il existe un certain nombre de types différents de graisse qui ont des rôles spéciaux, particulièrement dans le cerveau.
Le cerveau se repose, en grande partie, sur la graisse pour sa fonction normale. Comme les fils électriques, les saillies du cerveau sont revêtues d'un isolant qui aide les signaux à parcourir de longues distances sans se perdre. Les isolants qui entourent ces saillies dans le cerveau sont faits de graisse - en conséquence, loin d'être une mauvaise chose, la graisse est essentielle pour le fonctionnement normal du cerveau.
Les gangliosides dans la MH
En 2010, une équipe dirigée par Simonetta Sipione de l'Université d'Alberta a remarqué qu'un type intéressant de graisse, appelé ganglioside GM1, était réduit dans les cellules et les cerveaux de patients MH.
Les ‘gangliosides’ sont des types spéciaux de graisse qui agissent, non seulement pour isoler le câblage de notre cerveau, mais aussi pour se communiquer d'importants messages. Nous savons que les gangliosides sont importants car les terribles maladies infantiles résultent de mutations génétiques qui affectent la façon dont l'organisme va les gérer.
Les problèmes cérébraux sont une caractéristique commune des maladies causées par des mutations concernant les gangliosides, suggérant que quels que soient les rôles que jouent les gangliosides, ils sont d'une importance cruciale pour le fonctionnement du cerveau. Lorsque Sipione et ses collègues ont observé des diminutions du ganglioside GM1, ils ont été confrontés à une question - la restauration des taux de ces importantes graisses pourrait-t-elle être utile dans la M.H. ?
La restauration de GM1
Pour répondre à cette question, Sipione et son équipe se sont tournées vers des souris porteuses de la copie mutée du gène MH humain. Ces souris développent des symptômes, en particulier des problèmes moteurs, qui pourraient être semblables à ceux des patients MH. Comme eux, ces souris ont également des taux réduits du ganglioside GM1.
Le moyen le plus simple, pour remettre quelque chose qui manque, est précisément de l'injecter, et c'est justement ce que cette équipe de scientifiques a fait. Pour faire le point sur le rôle des gangliosides dans le cerveau, l'équipe de Sipione a utilisé de minuscules pompes pour délivrer GM1 directement dans le cerveau des souris, pendant quatre semaines. Les scientifiques ont pu mesurer les taux de GM1 dans le cerveau et déterminer que cette approche avait été un succès - les taux de GM1 ont augmenté à des taux normaux après l'injection.
Les souris allaient mieux
Cette thérapie a-t-elle fonctionné ? Oui - et étonnamment bien, à en juger par les améliorations observées dans le comportement des souris. Les scientifiques ont injecté GM1 à des souris âgées de cinq mois. A ce stade, les souris ont déjà des problèmes de coordination, et l'injection de GM1 a conduit à un renversement total de ces problèmes. L'équipe a utilisé plusieurs tests différents pour comprendre comment le comportement des souris s'était amélioré, et les souris traitées ont réussi tous les tests.
C'est une chose passionnante - de nombreux traitements ont commencé à un stade précoce chez des modèles de souris MH, avant que les symptômes ne débutent. Ce serait beaucoup plus difficile à réaliser chez les êtres humains car les préoccupations éthiques et sécuritaires font qu'il est très difficile d'imaginer de traiter des porteurs de la mutation MH dès leur naissance. Traiter des animaux après l'apparition des symptômes de la maladie est beaucoup plus approprié pour comprendre ce qui pourrait se passer si nous essayions cela chez les êtres humains, mais étonnamment, la plupart des essais sur les animaux ne sont pas exécutés de cette façon.
Comment le traitement a-t-il réussi ?
Il est difficile de dire précisément pourquoi les injections de GM1 étaient tellement bénéfiques, car nous ne comprenons pas complètement toutes les tâches exercées par les gangliosides dans le cerveau. Mais Sipione et son équipe étaient curieuses de savoir s'il y avait des changements au niveau de ce que nous comprenons, lesquels pourraient expliquer les bénéfices observés.
La protéine huntingtine, mutée chez les patients MH, est modifiée dans les cellules après qu'elle ait été produite. Un des moyens de modification est le marquage de la protéine avec des petites étiquettes chimiques qui peuvent changer lorsque la protéine va au sein de la cellule ; ainsi que d'autres effets, moins bien compris.
Sipione s'est tournée vers Ray Truant de l'Université de McMaster, un expert de ces types de modifications de la protéine huntingtine, afin d'obtenir de l'aide pour comprendre les résultats GM1. Les deux équipes ont examiné deux ‘adresses’ spécifiques au sein de la protéine huntingtine, appelées S13 et S16. Nous savons que l'ajout de balises ‘phosphate’ à ces endroits rend la protéine huntingtine mutée beaucoup moins toxique.
En accord avec l'idée que plus de phosphorylation à ces deux endroits est une bonne nouvelle, l'équipe de Sipione a constaté plus de phosphorylation chez les souris traitées avec GM1. Ceci donne quelques ‘tuyaux’ aux scientifiques qui tentent de comprendre le mécanisme utilisé par GM1 pour protéger les cellules.
Le potentiel humain
Le résultat de Sipione et de son équipe est très passionnant mais pourrait-il mener à des essais chez les êtres humains ? Généralement, il est très difficile de prévoir comment ces types d'études seront ‘traduites’ des animaux aux êtres humains, mais dans ce cas il y a de bons signes.
Tout d'abord, les GM1 ont été utilisés chez les êtres humains dans des essais cliniques avec un bon profil d'innocuité. La simple innocuité est un énorme obstacle pour de nombreux médicaments. Par ailleurs, dans un petit essai sur cinq patients, les GM1 ont été en fait injectés dans le cerveau de patients atteints de la maladie d'Alzheimer pendant une année sans évènement indésirable majeur. Ce type de délivrance dans le cerveau est délicat ; ainsi, le fait que GM1 semble être bien toléré, après ce type d'injection directe, est une bonne nouvelle.
Il est encore trop tôt pour considérer GM1 comme une thérapie pour la M.H. - il reste de nombreuses étapes à franchir avant qu'elle ne soit testée chez les patients humains. Mais le niveau d'amélioration des souris est frappant, et nous pourrions envisager de futures études sur le rôle potentiel de GM1 comme thérapie dans le cadre de la M.H.