Par Dr Rachel Harding Traduit par Michelle Delabye & Dominique Czaplinski Edité par Professor Ed Wild

Au mois de septembre, le réseau européen sur la maladie de Huntington (EHDN) a organisé un évènement virtuel comprenant des présentations sur certaines des dernières recherches scientifiques, ainsi que sur des recherches cliniques sur la maladie de Huntington.Chercheurs, médecins, patients et autres personnes intéressées ont assisté à un après-midi de discussions, ainsi qu’à des séances de questions et réponses pour connaître et discuter de certains des développements récents de la recherche sur la maladie de Huntington.

Les séances scientifiques

Lesley Jones (Université de Cardiff, Royaume-Uni) a présidé la première séance portant sur certaines des dernières recherches menées par les laboratoires du monde entier travaillant sur la MH.

Les chercheurs, présents à cette séance scientifique, ont abordé certaines des dernières recherches portant sur ce que l’on sait de la protéine huntingtine, sur la mutation responsable de la MH et les nouvelles découvertes concernant le mécanisme de la MH qui pourraient un jour être utilisées pour concevoir de nouveaux médicaments.
Les chercheurs, présents à cette séance scientifique, ont abordé certaines des dernières recherches portant sur ce que l’on sait de la protéine huntingtine, sur la mutation responsable de la MH et les nouvelles découvertes concernant le mécanisme de la MH qui pourraient un jour être utilisées pour concevoir de nouveaux médicaments.
Crédits graphiques: Darryl Leja, NHGRI

Frédéric Saudou (INSERM, France) a débuté par un exposé sur la fonction de la protéine huntingtine. Il s’agit de la protéine codée par le gène huntingtin, lequel est muté chez les patients atteints de la MH. Cette protéine est l’une des plus grandes fabriquées dans notre corps et se lie à de nombreuses autres protéines dans la cellule, ce qui rend difficile son étude par les scientifiques. Le laboratoire du Professeur Saudou s’intéresse au rôle de la protéine huntingtine dans des capsules en mouvement, appelées vésicules, dans les cellules nerveuses, un processus primordial pour le fonctionnement du cerveau. En utilisant la technique “brain on a chip”, ils peuvent examiner, dans leurs modèles MH, comment le mouvement des vésicules change chez les patients atteints de la MH, ainsi que la manière dont les cellules cérébrales se connectent et travaillent ensemble.

Ensuite, Darren Monckton (Université de Glasgow, Royaume-Uni) a présenté une mise à jour sur les recherches de son groupe portant sur l’expansion somatique. Ainsi qu’HDBuzz l’a récemment publié, l’expansion somatique est associée à la gravité de la maladie de Huntington et l’augmentation de la longueur des répétitions CAG dans le gène huntingtin au sein de certaines cellules et types de tissus peut entraîner une apparition plus précoce des symptômes. Les scientifiques ont récemment constaté que certains petits changements dans le code des gènes de réparation de l’ADN peuvent affecter la quantité d’expansion somatique qui se produit. Cela donne un sens aux données de l’étude d’association pangénomique (analyse de nombreuses variations génétiques chez de nombreux individus, afin d'étudier leurs corrélations avec des traits phénotypiques) qui montrent que ces petites variations dans la séquence des gènes de réparation de l’ADN peuvent provoquer une apparition précoce ou tardive des symptômes chez les patients. Comprendre le mécanisme précis et connaître quels gènes sont impliqués pourraient ouvrir de nombreuses opportunités pour le développement de nouvelles thérapies dans le cadre de la MH.

Hilal Lashuel (EPFL, Suisse) a présenté ensuite les récentes découvertes de son laboratoire concernant un gène appelé TBK1 dans le cadre de la MH. TBK1 est capable de marquer la protéine huntingtine avec une étiquette spéciale appelée phosphorylation. Lorsque la protéine huntingtine est marquée par TBK1 chez des modèles MH de laboratoire, les cellules nerveuses survivent beaucoup mieux et cet effet est inversé si l’activité de TBK1 est bloquée. L’activation de TBK1 chez les patients MH pourrait être une nouvelle façon de traiter la MH.

Le dernier exposé de la séance scientifique est réalisé par George McAllister (Fondation CHDI, USA), qui a parlé des nouvelles thérapies orales prometteuses pour diminuer la huntingtine. Bien que non encore en clinique, il existe un certain nombre de sociétés, telles que Novartis et PTC, qui développent des médicaments de diminution de la huntingtine, lesquels pourraient être administrés sous forme de pilule. Cela signifierait éviter les méthodes intrathécales (ponction lombaire) ou intracrâniennes (injection dans le cerveau) pour administrer le médicament, ce que de nombreuses thérapies de diminution de la huntingtine utilisent actuellement dans les essais cliniques. Les chercheurs espèrent que cela facilitera la prise du médicament par les patients. Avoir une thérapie orale signifierait également que l’ensemble du corps pourrait être traité, pas uniquement le cerveau, ce qui aurait pour effet supplémentaire de permettre d’évaluer plus facilement l’efficacité du médicament en mesurant dans le sang par exemple. Les effets du médicament seraient également réversibles si le traitement était interrompu. Cependant, il existe de nombreux problèmes potentiels que les scientifiques doivent examiner attentivement, par exemple si le ciblage de l’ensemble du corps est approprié ou s'il y aurait des effets hors cible. On espère que les études précliniques et cliniques apporteront des réponses et HDBuzz est impatient de publier un compte-rendu sur ces nouvelles thérapies intéressantes dans l'année à venir.

Mises à jour sur les études et essais cliniques

La séance suivante de la journée a été présidée par Jean-Marc Burgunder (Université de Bern, Suisse) et était plus axée sur les études cliniques actuellement en cours pour trouver de nouveaux traitements pour la maladie de Huntington.

Cette séance a débuté avec un exposé de Sarah Tabrizi (UCL, Royaume-Uni), laquelle a présenté des informations concernant l’extension en ouvert s’agissant du médicament Tominersen, la thérapie de diminution de la huntingtine développée par le groupe ROCHE. Cette étude d’extension examine l’innocuité à long terme du traitement chez un petit groupe de patients MH au stade précoce sur une période de 15 mois. L'une des principales conclusions de l'étude était que les périodes de temps d’attente plus longues entre les doses de Tominersen réduisaient encore suffisamment la huntingtine, et que le schéma thérapeutique plus espacé entraînait également moins d'effets secondaires négatifs pour les patients traités. Ce schéma thérapeutique de 8 semaines sera désormais utilisé dans l’essai GENERATION HD1, lequel évaluera si le traitement Tominersen améliore les résultats pour les patients MH. On sait que ce médicament réduit les taux de huntingtine lorsqu’on évalue le liquide céphalo-rachidien d’un patient traité, que les médecins utilisent comme indicateur pour quantifier la huntingtine dans le cerveau. Les scientifiques doivent maintenant déterminer si la diminution de la huntingtine est suffisante pour améliorer les symptômes des patients. L’essai est désormais complet et nous sommes reconnaissants vis-à-vis des 791 patients MH du monde entier qui se sont inscrits à cet essai clinique très important. Malgré la pandémie de COVID-19, le groupe ROCHE déclare qu’il travaille d’arrache-pied afin d’en atténuer les effets sur les essais en cours tout en assurant la sécurité des patients, des cliniciens et des familles MH.

Ensuite, Anne Heinzmann (ICM, Institut du cerveau, France) a présenté une mise à jour concernant l’étude PRECISION-HD, une autre thérapie de diminution de la huntingtine développée par la société Wave. La thérapie de la société Wave cible spécifiquement la version mutée du gène huntingtin, laquelle pourrait être une approche privilégiée car elle laisse intacts les taux de huntingtine “saine”. Toutefois, ce traitement n’est disponible que pour les patients ayant un code-barre spécifique dans leur ADN car c'est ainsi que le médicament cible la version mutée de la huntingtine, et par conséquent tous les patients ne sont pas éligibles. Jusqu’à présent, les scientifiques de la société Wave ont montré que leur thérapie est sans danger pour les patients mais ils poursuivront d'autres découvertes au premier trimestre de 2021 qui, on l’espère, indiqueront dans quelle mesure leur médicament fonctionne pour réduire la mutation de la huntingtine.

De nombreuses mises à jour très intéressantes ont été présentées s'agissant des thérapies de diminution de la huntingtine, ainsi que s'agissant d'autres types de médicaments conçus les scientifiques qui, espère-t-on, pourraient ralentir ou arrêter la progression de la MH.
De nombreuses mises à jour très intéressantes ont été présentées s'agissant des thérapies de diminution de la huntingtine, ainsi que s'agissant d'autres types de médicaments conçus les scientifiques qui, espère-t-on, pourraient ralentir ou arrêter la progression de la MH.

La présentation suivante donne un aperçu de l’étude d’histoire naturelle qui sera menée par la compagnie Triplet Therapeutics. Anne Rosseer (Université de Cardiff, Royaume-Uni) a expliqué comment cette étude jettera les bases des futurs essais cliniques visant à cibler les voies de réparation des dommages à l’ADN. La compagnie Triplet a montré que, chez des modèles murins MH, la réduction des taux de certaines protéines de réparation des dommages à l’ADN peut interrompre le processus d’expansion somatique. En ciblant l’expansion somatique de cette manière, la compagnie Triplet espère traiter la pathologie sous-jacente de la MH. Ils mènent cette étude d’histoire naturelle afin d’éclairer la conception d’un futur essai clinique et de déterminer quelles mesures ils pourraient devoir prendre sur les patients afin de savoir si leur traitement agit. Les patients MH recrutés dans cette étude seront évalués par les médecins selon diverses méthodes sur une période de deux ans et les données et échantillons (tels que le sang) prélevés sur les patients seront très importants pour les scientifiques afin de mieux concevoir les futurs essais cliniques.

Bernhard Landwehrmeyer (Université de Ulm, Allemange) a présenté le prochain exposé portant sur l’étude PROOF-HD qui déterminera le potentiel de traitement des patients MH avec le médicament Pridopidine. Ce médicament peut affecter la fonction de signalisation dopaminergique des cellules nerveuses et a déjà fait l’objet d’essais cliniques chez les patients MH. Bien que les précédents essais aient eu des résultats décevants, ce nouvel essai espère qu'en examinant des patients au stade précoce pendant beaucoup plus longtemps, ils pourront voir de meilleurs résultats pour les patients.

Ralf Reilmann (Institut George Huntington, Allemange) a présenté une mise à jour de la thérapie génique Uniqure AAV qui vise également à diminuer la huntingtine. La thérapie AMT-130 de la compagnie Uniqure est administrée dans le cadre d’une seule chirurgie cérébrale et cette approche à base de virus modifie de manière irréversible l'ADN du patient, ce qui entraîne une diminution des taux de la huntingtine. Les scientifiques ont pu montrer que ce traitement était à la fois sans danger et efficace pour diminuer la huntingtine chez des petits et grands modèles animaux MH, tels que les rats, les porcs et les singes. L’étude MAT-130-01 actuelle examinera comment cela se traduit chez l’homme et si le médicament est encore sans danger pour le petit groupe de patients qui le recevront. 26 patients recevront la thérapie par chirurgie cérébrale et seront suivis au sein de cliniques spécialisées MH dans le monde entier. Le recrutement est en cours aux Etats-Unis pour l’étude.

Anne-Catherine Bachoud-Levi (INSERM, France) a présenté un exposé s’agissant de l’essai clinique MIG-HD. Cet essai a examiné l'utilisation des cellules souches dans le traitement de la MH dans une longue étude clinique s'étalant sur plus d'une décennie. Bien que le traitement testé dans cet essai spécifique n’ait pas réussi à traiter la MH, les scientifiques ont beaucoup appris sur les meilleures pratiques pour ce type de traitement de transplantation de cellules souches. Depuis l’essai, il y a eu d'énormes progrès dans la compréhension des cellules souches. Bachoud-Levi et son équipe espèrent que de nouvelles thérapies à base de cellules souches pourront, dans l’avenir, être utiles aux patients atteints de MH.

Le dernier exposé de la journée était celui de Hugh Rickards (Université de Birmingham, Royaume-Uni) qui a parlé du projet d’égalité d’accès aux médicaments efficaces (HEATED). Dans la mesure où il y a un nombre croissant de médicaments très intéressants dans les essais cliniques, de nombreuses personnes dans la communauté de recherche sur la MH s'attendent à ce qu'il y en ait quelques-uns qui pourraient être approuvés pour une utilisation chez les patients MH. Toutefois, il est probable que ceux-ci puissent être très coûteux, ce qui signifie que tous les patients MH ne pourraient pas y accéder immédiatement. Rickards s'efforce de comprendre les défis liés à l'accessibilité des médicaments MH afin de garantir au plus grand nombre de patients possible l’accès aux thérapies lorsqu'elles deviennent disponibles.

Revoir en ligne

Vous pouvez regarder toutes les interventions sur le site d'EHDN. Pour en savoir davantage sur les essais cliniques MH actuels, visitez HD Trial Finder.

Le Dr Harding ne déclare aucun conflit d'intérêt. Le professeur Wild est chercheur et membre du conseil consultatif des programmes d'essais cliniques Roche et Triplet Therapeutics. Pour plus d'informations sur notre politique d'information voir notre FAQ ...