Le lauréat du prix HDBuzz 2012 : la stimulation cérébrale profonde pour la MH
Lauréat du prix HDBuzz 2012 : la stimulation cérébrale profonde pour traiter les mouvements involontaires
Par Melissa Christianson 19 novembre 2012 Edité par Professor Ed Wild Traduit par Michelle Delabye & Dominique Czaplinski Initialement publié le 29 octobre 2012
La stimulation cérébrale profonde - une procédure dans laquelle des électrodes miniatures, libérant des impulsions électriques, sont implantées dans le cerveau – ressemble à quelque chose sortie d’un film de science-fiction effrayant. Toutefois, ce traitement science-fiction pourrait s’avérer utile pour réduire les symptômes des mouvements involontaires, connus sous le nom de chorée chez les patients MH.
Cet article, rédigé par Melissa Christianson de l'Université de Duke, est le gagnant du prix HDBuzz 2012 pour les jeunes écrivains scientifiques. Félicitations à Melissa, qui gagne £500 et se joint à notre équipe de rédacteurs.
Chorée : principal symptôme de la maladie de Huntington
L'un des aspects les plus frappants de la maladie de Huntington est le développement progressif des mouvements musculaires involontaires, connus sous le nom de chorée. Bien que chorée signifie littérairement ‘danser’, sa légère définition dément son réel impact chez les personnes atteintes de la MH. La chorée peut interférer avec la vie quotidienne, et dans certains cas, elle peut compromettre la santé et l'autonomie.
Les scientifiques estiment que la chorée est causée par la mort des cellules du cerveau, situées dans une partie spécifique de celui-ci, appelée le striatum. Normalement, les cellules situées dans le striatum agissent comme le chef d'orchestre d'une symphonie : elles équilibrent soigneusement les taux d'activité de chaque zone du cerveau (tout particulièrement ceux impliqués dans le mouvement), afin de produire un résultat clair et coordonné. Tout comme la musique d'un chef d'orchestre devient dissonante, l'activité dans le cerveau perd son harmonie en l'absence d'un équilibre soigneux du striatum. En conséquence, les cellules demeurant dans le reste du cerveau mettent en place de nouveaux modèles d'activité asymétriques produisant les mouvements involontaires de la chorée.
Toutefois, les chercheurs étudient maintenant une procédure spéciale, connue sous le nom de stimulation cérébrale profonde, laquelle pourrait être en mesure d'interrompre ces modèles déséquilibrés et réduire la chorée dans la MH.
La stimulation cérébrale profonde : bouton de réinitialisation pour le cerveau MH ?
La stimulation cérébrale profonde ressemble vraiment à quelque chose sortie d'un film de science-fiction. Dans le cadre de celle-ci, les médecins implantent de minuscules électrodes dans des zones spécifiques du cerveau (comme celles contrôlant le mouvement), afin que ces électrodes puissent envoyer des impulsions électriques miniatures dans les régions environnantes du cerveau. Bien que l'électricité soit le langage que les cellules du cerveau utilisent pour communiquer, ces électrodes ne cherchent pas à converser poliment avec les cellules du cerveau qui leur sont proches. Au contraire, c'est l'équivalent de crier à l'encontre des cellules du cerveau, qui leur sont proches, de se taire !
Scientifiquement, l'idée est que l'électricité issue des électrodes réduira au silence, les signaux provenant des cellules du cerveau, situées dans leur voisinage. Ce silençage pourrait être extrêmement utile dans les zones du cerveau MH ayant perdu leur ‘chef d'orchestre’ situé dans le striatum et qui envoient ainsi des modèles d'activités déséquilibrés, causant la chorée. En un sens, les électrodes pourraient agir comme un bouton de réinitialisation dans un bowling, permettant aux médecins d'interrompre tout modèle d'activité chaotique que les cellules du cerveau ont mis en place et ainsi, stopper les mouvements de chorée.
La stimulation cérébrale profonde dans la lutte contre la MH
«L'idée est que l'électricité provenant des électrodes réduira au silence les signaux provenant des cellules du cerveau situées dans leur voisinage. »
Les scientifiques du monde entier ont maintenant commencé à étudier la façon d'utiliser la stimulation cérébrale profonde afin de traiter les personnes atteintes de la maladie de Huntington. Se basant sur des travaux antérieurs réalisés chez des patients atteints de la maladie de Parkinson, traités avec succès dans le cadre d'une stimulation cérébrale profonde, les scientifiques ont commencé à tester la stimulation cérébrale profonde aux fins de voir si elle améliore des choses telles que la chorée, la coordination motrice, l'autonomie, la capacité fonctionnelle chez les personnes MH.
Bien que cette recherche ait progressé en grande partie à petits pas, les résultats des dix dernières années sont généralement prometteurs. Dans chacune des six études de cas de patients publiées à ce jour, la chorée chez les personnes MH a été améliorée après une stimulation cérébrale profonde. Beaucoup de ces études ont également noté que la coordination motrice, l'autonomie et la capacité fonctionnelle ont été améliorées chez les patients MH. Enfin, les patients de ces études ont développé peu d'effets secondaires négatifs, et ces effets secondaires peuvent être, en général, éliminés en bricolant avec les détails spécifiques de la procédure de stimulation cérébrale profonde.
Le diable est dans les détails
Cependant, il ressort également de ces résultats prometteurs que les chercheurs ont encore beaucoup de travail à faire avant de pouvoir décrire avec certitude la meilleure façon d'effectuer une stimulation profonde cérébrale chez les personnes atteintes de la MH. Par exemple, ils doivent trouver exactement où placer les électrodes afin qu'elles interrompent au mieux les mouvements choréiques involontaires mais pas les mouvements normaux intentionnels des patients MH. La force des signaux électriques provenant des électrodes est également importante : des signaux trop faibles n'auront pas d'effets sur la chorée, et des signaux trop élevés pourraient entraîner de graves conséquences, des lésions aux cellules du cerveau situées à proximité des électrodes, ou des convulsions. Il n'est pas surprenant (puisque chacun sur la planète a un cerveau unique) que ces deux paramètres semblent varier selon les individus. Ainsi, la recherche a encore du chemin à parcourir avant que la stimulation cérébrale profonde devienne une option de traitement viable et conforme à la clinique.
De plus, les résultats de ces premières études prometteuses ont besoin d'être très soigneusement interprétées et ce, pour différentes raisons méthodologiques. Tout d'abord, les scientifiques ont étudié la stimulation cérébrale profonde chez seulement un très petit nombre de personnes atteintes de la MH. Effectuer des conclusions générales basées sur un petit nombre de personnes est dangereux. Par exemple, prenons en considération ce qui se passerait si vous sélectionniez les six prochaines personnes que vous rencontreriez pour leur taille et calculiez la moyenne. Ce chiffre serait-il vraiment significatif s'agissant de la taille moyenne de l'être humain ? Certainement pas si vous faites votre sélection sur un terrain de basket ! En conséquence, si les effets positifs décrits ci-dessus sont réels et applicables de façon générale à la population MH, cela reste à déterminer.
Deuxièmement, la plupart des études rapportées jusqu'à présent ont suivi des patients MH traités avec une stimulation cérébrale profonde sur seulement une courte période après le traitement (allant de quelques mois à plusieurs années). Il existe de nombreux exemples de traitements de la recherche qui au début sont géniaux et puis, deviennent inefficaces, voire même nocifs par la suite. Il suffit de penser au bien-être que vous apporte le chocolat lorsque vous êtes triste … et comment vous vous sentez moche après avoir descendu un paquet entier de M&Ms. Par conséquent, même si la stimulation cérébrale profonde améliore d'abord la chorée, il n'est pas certain qu'elle puisse continuer à être efficace chez des patients traités sur des périodes plus longues.
Une autre difficulté est la pratique. La stimulation cérébrale profonde implique une délicate chirurgie ciblée du cerveau, laquelle est notoirement difficile dans le meilleur des cas. Mais lorsqu'il s'agit d'explorer les zones du cerveau progressivement atrophiées en raison de la mort des neurones, le risque de complications ou de manquements de la cible est encore plus élevé. Cela signifie que la stimulation cérébrale profonde ne deviendra jamais un traitement de ‘routine’ pour les patients MH.
Enfin, un problème particulier dans les études de cas de patients : souvent, seules les études de cas qui ont du succès - en d'autres termes, les études où les patients s'améliorent - sont publiées. Ce n'est pas une nouvelle tendance dans la publication scientifique. Par exemple, Thomas Edison n'a pas publié les premières 1 000 façons de ne pas inventer l'ampoule électrique, mais seulement la dernière tentative réussie. Ainsi, les résultats généraux positifs évoqués ci-dessus peuvent ne pas être une description complète de la recherche sur la stimulation cérébrale profonde qui a été, effectivement, faite.
La ligne de fond
A la lumière de toutes ces mises en garde, qu'est-ce que la stimulation cérébrale profonde signifie pour la lutte contre la maladie de Huntington ? Tout d'abord, il est important de rappeler que la stimulation cérébrale profonde ne sera jamais un traitement MH, car elle n'empêche pas les cellules du cerveau de mourir. Même si elle agit pour réduire la chorée, la MH sera toujours présente et incurable.
Cependant, la stimulation cérébrale profonde peut avoir un potentiel en tant que traitement pour les symptômes de la maladie, tout particulièrement la chorée. Son utilisation pour réduire ou empêcher les mouvements involontaires associés à la MH ne serait pas seulement une mesure palliative mais elle pourrait prolonger l'espérance de vie fonctionnelle des personnes atteintes de la MH en les aidant à maintenir leur santé et leur autonomie après l'apparition de la maladie.
C'est avec cet objectif en tête que les scientifiques continueront à étudier la meilleure façon d'appliquer la stimulation cérébrale profonde, en tant que traitement potentiel de la maladie de Huntington.