
Trouver le bon côté : une mise à jour sur les données de l’essai GENERATION-HD1 de Roche
Les premiers résultats de l’essai GENERATION-HD1 sur la réduction de la huntingtine, mené par Roche et interrompu, ont été partagés cette semaine avec la communauté HD. HDBuzz explique ce qu’ils ont trouvé et ce qui va suivre.


Le 20 janvier, Roche a partagé un ensemble de données très attendues de l’essai GENERATION-HD1 sur le tominersen, un médicament réduisant la huntingtine. Bien que l’essai n’ait pas atteint ses objectifs principaux, et qu’un dosage trop fréquent ait même pu aggraver l’état des patients, de nouvelles découvertes nous donnent quelques raisons d’espérer que le tominersen pourrait encore bénéficier à certaines personnes atteintes de HD. En particulier, les participants plus jeunes avec des symptômes moins sévères semblent avoir mieux réagi à l’essai que les autres. Pour cette raison, Roche continuera à développer le tominersen en le testant dans un nouvel essai de phase II.
Ce que nous savions
Roche est l’une des nombreuses entreprises qui étudient les thérapies de réduction de la huntingtine, dans l’espoir que ces nouveaux médicaments puissent être utilisés pour traiter les personnes atteintes de la maladie de Huntington (HD). Les médicaments réduisant la huntingtine espèrent faire exactement ce qu’ils disent ; ils utilisent différentes astuces chimiques pour réduire les niveaux de la protéine huntingtine. Les personnes atteintes de HD produisent une forme différente de la protéine huntingtine qui ne fonctionne pas correctement et peut avoir des effets toxiques dans le cerveau et le corps. L’idée derrière les thérapies de réduction de la huntingtine est que la réduction de la quantité de protéine toxique pourrait ralentir ou améliorer les symptômes chez les personnes atteintes de HD. Le médicament de Roche s’appelle tominersen et il était étudié dans un essai clinique de phase 3 appelé GENERATION-HD1, qui comptait près de 800 participants sur de nombreux sites dans différents pays.

En mars 2021, la communauté HD a reçu la très triste nouvelle que le dosage dans l’essai GENERATION HD1 allait être arrêté. Cette décision a été prise sur les conseils du comité indépendant de surveillance des données (également appelé IDMC) qui a examiné les données avant même que les scientifiques, les cliniciens ou les sites d’essai de Roche ne les aient vues. La décision a été prise parce que les analyses des participants environ un an après le début de l’essai ont montré que le médicament n’avait aucun bénéfice, et que ceux qui recevaient la dose la plus fréquente (toutes les 8 semaines) semblaient en fait aller plus mal.
Le dosage a été arrêté il y a près d’un an, alors pourquoi a-t-il fallu si longtemps pour une mise à jour ? Eh bien, lorsque l’essai s’est terminé, toutes les données, échantillons et images cérébrales devaient être collectés dans près de 100 sites différents pour être traités et analysés. Ce n’est pas une mince affaire pour Roche, et nous savons que l’attente a été angoissante pour la communauté HD.
Ce que nous espérons découvrir à partir des données
Lorsque l’IDMC puis les scientifiques de Roche ont d’abord analysé toutes les données ensemble, ils ont pu voir que les personnes qui recevaient du tominersen toutes les 16 semaines allaient à peu près aussi bien que celles qui ne recevaient pas le médicament, et que celles qui recevaient du tominersen toutes les 8 semaines allaient moins bien que celles qui ne recevaient pas le médicament. En bref, l’essai GENERATION-HD1 n’a pas atteint son objectif de ralentir la progression de la HD – il n’a pas atteint ses critères d’évaluation principaux. C’est pourquoi le dosage a été arrêté. Cependant, l’une des principales choses que de nombreux scientifiques chez Roche et dans la communauté HD voulaient savoir était si le médicament aurait pu être bénéfique pour un sous-ensemble de patients.
HDBuzz a entendu de nombreuses personnes dans la communauté HD qui pensaient qu’elles-mêmes ou un membre de leur famille avaient bénéficié de leur participation à l’essai. Comme l’essai était en double aveugle (ni les participants ni les médecins de l’étude ne savaient si une personne recevait le médicament ou non), il est impossible de savoir si ces améliorations perçues étaient dues à l’effet placebo, au hasard, ou parce que le médicament ralentissait effectivement leur progression de la HD. Certaines personnes auraient-elles pu bénéficier du tominersen même si globalement l’essai n’a pas atteint ses objectifs ? Les participants à l’essai étaient considérés comme ayant des symptômes « précoces », mais cela variait d’une personne à l’autre. Peut-être que leur âge, leur nombre de CAG ou leurs symptômes pourraient faire une différence dans leur réponse au médicament ?
Pour essayer de répondre à ces questions, les scientifiques de Roche ont entrepris de découper et d’analyser les données de l’essai en divisant les participants en quatre groupes différents en fonction de leur âge (supérieur ou inférieur à 48 ans) et de leur score CAP (score CAP élevé ou faible). Le score CAP est une mesure utilisée par les cliniciens et les scientifiques qui prend en compte l’âge d’une personne et son nombre de répétitions CAG. C’est une façon d’estimer l’exposition d’une personne tout au long de sa vie aux effets nocifs du gène HD mutant. Ainsi, les personnes plus âgées avec des nombres de CAG plus élevés auraient des scores CAP plus élevés et auraient probablement des symptômes plus avancés qu’une personne plus jeune avec un score CAP plus faible. En divisant les données en deux par l’âge (moins ou plus de 48 ans) et le score CAP (inférieur ou supérieur à la médiane de tous les participants), Roche a créé quatre groupes à analyser. Ces groupes étaient : âge bas/CAP bas, âge bas/CAP élevé, âge élevé/CAP bas, et âge élevé/CAP élevé. Roche a comparé le placebo aux individus prenant le médicament toutes les 8 ou 16 semaines dans chacun de ces groupes.
Ce que nous savons maintenant
Deux résultats clés ont été mesurés dans cet essai, en plus de nombreux autres résultats exploratoires. Il s’agit du cUHDRS (échelle d’évaluation unifiée composite de la maladie de Huntington) et du TFC (capacité fonctionnelle totale), qui combinent des tests et des rapports sur les capacités de mouvement et de réflexion d’une personne. Dans chacun des quatre groupes, tous ceux qui recevaient du tominersen toutes les 8 semaines avaient des scores cUHDRS et TFC pires que ceux qui ne recevaient pas le médicament, quel que soit leur âge ou leur score CAP. Bien qu’aucun effet secondaire dangereux majeur n’ait été observé, il est clair que l’administration trop fréquente de tominersen pourrait être nocive à long terme.
Pour ceux qui recevaient du tominersen toutes les 16 semaines, le tableau était légèrement plus encourageant – mais plus compliqué. Sur les quatre groupes, seuls les participants du groupe âge bas/CAP bas (moins de 48 ans, et probablement moins symptomatiques) pourraient avoir eu un petit bénéfice du tominersen : leurs scores cUHDRS et TFC après plus d’un an sous tominersen pourraient avoir été un peu meilleurs par rapport au groupe qui n’a pas reçu le médicament. Cependant, il est important de noter que cette observation n’est PAS statistiquement significative, elle est simplement prometteuse et justifie une étude plus approfondie.
Roche a également présenté certaines de ses découvertes issues de l’analyse des biomarqueurs des échantillons de liquide céphalo-rachidien collectés pendant l’étude. Les niveaux de huntingtine mutante ont diminué comme prévu chez les participants qui ont reçu du tominersen, avec une diminution plus forte lorsqu’il était administré plus fréquemment – c’est ce qu’on appelle la « dépendance à la dose ». Cela montre que le médicament fait ce pour quoi il a été conçu. Un autre biomarqueur mesuré dans l’étude était le NfL, dont des niveaux plus élevés sont censés refléter des dommages au cerveau. Dans les groupes d’âge plus élevé dosés toutes les huit semaines avec le tominersen, les niveaux de NfL ont d’abord augmenté, mais sont retombés vers les niveaux de base à la fin de l’essai. Seules des augmentations très légères, voire nulles, du NfL ont été observées pour les sous-groupes plus jeunes et tous étaient proches du niveau de base à la semaine 69. Dans l’ensemble, c’est un résultat positif car cela signifie que le cerveau peut se remettre du défi initial de ce type de dosage de médicament pour les individus plus jeunes.
Ce que nous ne savons toujours pas encore
Il reste de nombreuses questions sans réponse concernant cet essai, et Roche continuera à partager des informations dans les prochaines mises à jour. Il est important de se rappeler qu’il ne s’agit que d’une divulgation partielle des données à ce stade, il y aura probablement plus d’informations à venir dans les futures présentations.
« L’une des principales choses que de nombreux scientifiques chez Roche et dans la communauté HD voulaient savoir était si le médicament aurait pu être bénéfique pour un sous-ensemble de patients. »
Une question très importante à laquelle nous n’avons toujours pas de réponse précise est de savoir pourquoi le tominersen rendait les gens plus malades dans le groupe de dosage de 8 semaines. Il y a beaucoup d’idées en discussion mais pas encore de preuves concluantes.
Un autre domaine à explorer davantage sont les données d’imagerie cérébrale collectées lors de l’essai. Dans les analyses présentées le 20 janvier, les scientifiques ont examiné les changements dans le volume d’une partie du cerveau appelée le noyau caudé, qui a tendance à diminuer à mesure que la HD progresse. Ils ont également examiné la taille des ventricules, où le liquide circule dans tout le cerveau. Il semble que les volumes du noyau caudé aient été maintenus pour le sous-groupe âge bas/CAP bas qui a reçu la dose la plus faible du médicament, ce qui pourrait être un bon signe. Cependant, ces données sont difficiles à interpréter, car les volumes ventriculaires ont également augmenté, ce qui pourrait suggérer des choses négatives comme l’inflammation ou la perte des cellules cérébrales autour des ventricules. Ces données devront être analysées plus en profondeur.
Plus important encore, bien que le tominersen aille de l’avant, nous ne savons toujours pas s’il peut ralentir ou arrêter les symptômes de la HD.
Messages à retenir
Dans l’ensemble, ces données sont encourageantes, car elles suggèrent que le tominersen pourrait encore avoir un certain bénéfice dans la HD, en particulier pour les jeunes adultes avec des scores CAP plus bas. Cette lueur d’espoir est ce qui a conduit Roche à décider de faire un pas en arrière et de mener un nouvel essai de Phase II du tominersen. Il est important de garder à l’esprit que ces analyses ont été faites après coup ; GENERATION-HD1 a été conçu pour examiner les bénéfices possibles du tominersen chez tous les participants, pas dans ces sous-groupes. L’essai de Phase III n’a pas atteint ses objectifs clés dans l’ensemble, nous devons donc aborder ces résultats post-hoc avec un optimisme prudent.
Cela dit, nous pouvons être confiants que les principales conclusions de l’essai interrompu aideront à façonner non seulement le prochain essai de tominersen, mais aussi d’autres essais de réduction de la huntingtine. Rétrospectivement, une critique majeure de la conception de l’essai GENERATION-HD1 était sa dose unique élevée (120 mg) – que nous savons maintenant être trop élevée lorsqu’elle est administrée toutes les 8 semaines. De plus, il semble que le sous-groupe de personnes à faible âge/faible CAP dans l’essai ait une plus grande résilience cérébrale, car elles ont pu tolérer une dose élevée de tominersen toutes les 16 semaines, et pourraient même en avoir bénéficié. Cela suggère qu’explorer des dosages plus faibles ou moins fréquents dans cette population pourrait être une meilleure stratégie, et ce sera un objectif majeur pour le prochain essai de Phase II.
La conclusion la plus excitante de l’analyse partagée hier par les scientifiques de Roche est qu’il existe une voie à suivre pour le tominersen dans la MH très précoce, plutôt qu’un arrêt total. Michaela Winkelmann, Présidente de la Société allemande de la MH (Deutsche Huntington Hilfe) a décrit la présentation des données d’aujourd’hui comme « une lumière au bout du tunnel » pour un petit groupe de la communauté MH. Et bien que l’attention de Roche dans un avenir proche puisse représenter une petite partie de la population MH, cela n’exclut pas la possibilité que le tominersen ou d’autres médicaments réduisant la huntingtine puissent bénéficier à un groupe beaucoup plus large.
Quelle est la suite pour le tominersen
Il est très important de se rappeler que toute cette analyse est considérée comme « post hoc ». Cela signifie que l’essai n’a pas été conçu pour répondre aux questions que Roche pose maintenant en divisant les données en groupes plus petits, donc nous devons prendre toutes ces conclusions avec beaucoup de prudence. Pour déterminer de manière plus concluante si le tominersen est effectivement bénéfique chez les individus à faible âge/faible CAP, Roche prévoit de mener un autre essai de Phase II. Aucun détail n’a encore été communiqué à ce sujet, mais nous ne manquerons pas de vous tenir informés.
D’autres analyses des données existantes sont encore en cours et nous espérons en apprendre davantage de la part de Roche sur leurs conclusions supplémentaires lors de la Conférence sur les thérapeutiques CHDI à Palm Springs, qui devrait se tenir fin février. HDBuzz live-tweetera toutes les présentations de cette conférence, alors restez à l’écoute.
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Sources et références
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