Par Prof Jenny Morton Edité par Professor Ed Wild Traduit par Laurie Galvan

De nombreux patients atteints de la maladie de Huntington (MH) sont sujets non seulement à des troubles du sommeil mais ont également des difficultés à gérer leur journée ou autrement appelé « le rythme circadien ». Ces troubles pourraient faire parti de l’éventail des symptômes de la MH et par conséquent, les traiter directement pourrait être bénéfique. Dans ce spécial d’HDbuzz, l’expert du sommeil, le Professeur Jenny Morton s’intéresse à la science derrière les troubles du sommeil et ses solutions dans la MH. Bientôt disponible dans la seconde partie : « les simples règles pour une bonne nuit de sommeil ».

Après une longue journée, nombre d’entre nous espère trouver le réconfort dans une bonne nuit de sommeil. Etre fatigué ne garantit pas un sommeil réparateur. Pour ceux que le sommeil oublie, la nuit peut être un moment de solitude et d’angoisse. Bien souvent, ceux qui partagent la vie des personnes privées de sommeil partagent aussi ce fardeau. Malheureusement pour la personne atteinte d’une maladie neurologique telle que la MH, les conséquences des troubles du sommeil ne seraient pas seulement pénibles et perturbatrices, mais aussi pourraient contribuer significativement à leurs symptômes.

Nous avons tous besoin de dormir

Les troubles du sommeil se retrouvent communément dans la population. Les personnes atteintes la maladie de Huntington présenteraient plus de facteurs expliquant leurs difficultés à dormir.
Les troubles du sommeil se retrouvent communément dans la population. Les personnes atteintes la maladie de Huntington présenteraient plus de facteurs expliquant leurs difficultés à dormir.

Il ne fait aucun doute que le sommeil est essentiel et bénéfique pour maintenir un rythme quotidien équilibré. La privation de sommeil à court terme n’induit pas de dommages persistants mais impacte inévitablement sur l’humeur. Sans un sommeil adéquat, les individus deviennent irritables et incapables de rester attentifs. Ils peuvent aussi devenir déraisonnables et s’emporter facilement.

La plupart d’entre nous peuvent se ressourcer après quelques nuits de sommeil. Mais que se passe-t-il si vous avez la MH ?

De nombreuses preuves montrent que les patients de la MH souffrent fréquemment d’anomalies du sommeil et du contrôle du jour ou autrement dit du « rythme circadien ». Il est possible que ces anomalies du sommeil et du rythme circadien fassent partie intégrante des symptômes de la maladie. Ces troubles ont un impact négatif sur la vie quotidienne et il est important qu’ils soient détectés chez toutes personnes, même non atteintes de problèmes neurologiques. Les perturbations du cycle du sommeil et du rythme circadien chez les patients de la MH contribuent à l’aggravation de leurs symptômes dont la privation de sommeil mais aussi l’irritabilité et l’anxiété.

Si vous êtes atteint de la MH et que vous avez des troubles du sommeil, les chiffres nous disent que ce dernier peut ne pas être forcement attribué à la maladie. Un pourcentage significatif de la population souffre des troubles du sommeil dus à de mauvaises habitudes, à leur style de vie et à leur environnement. Nous restons éveillés trop tard et nous nous réveillons trop tôt. Nous prenons des médicaments qui interfèrent avec notre sommeil, nous nous auto – stimulons avec des activités tardives telles que le travail ou la télévision. Les patients atteints de la MH ne font pas exceptions à cela. La différence est que ces patients en question n’ont pas de réserves qui permettent à une personne en bonne santé de tenir le coup face à une privation de sommeil.

La privation chronique de sommeil est dommageable pour la santé même chez les personnes en bonne santé, donc il est possible que ce manque chronique de sommeil puisse contribuer au déclin des fonctions mentales dans la MH. Il est donc envisageable que traiter les troubles du sommeil puisse retarder le déclin cognitif et émotionnel observés dans la MH.

Y-a-t-il une différence entre le sommeil et le rythme circadien ?

Le rythme circadien et le sommeil sont deux processus différents néanmoins les termes sont souvent interchangeables. Les rythmes circadiens sont des processus biologiques qui changent environ toutes les 24 heures. Ils sont orchestrés par une petite région du cerveau appelée noyau suprachiasmatique ou SCN. Le SCN est connu comme le « maître horloger » du corps. Il régule les activités journalières, incluant les moments où vous vous levez et vous vous couchez.

Dormir est à l’évidence un « comportement circadien » car cela se produit au moins une fois par jour. Ce n‘est qu’un des comportements circadiens que le maître horloger contrôle. Les autres mécanismes incluent le rythme cardiaque, la sécrétion des hormones, la pression sanguine et la température corporelle.

Le sommeil est un comportement circadien qui est influencé par le SCN mais ce n’est pas lui qui le génère. Le sommeil est un mécanisme très complexe, et les processus mis en place pour préparer le sommeil, le maintenir and se réveiller sont tous contrôlés par différentes régions du cerveau.

Les différentes phases du sommeil peuvent être identifiées en contrôlant l’activité électrique du cerveau. Les mécanismes qui génèrent le sommeil et le contrôle des mouvements entre les différentes phases du sommeil ne sont pas pleinement compris. Le ** pourquoi ** nous dormons nous ait inconnu, même si de nombreuses évidences mettent en avant que dormir est important pour l’apprentissage et la formation des souvenirs.

Maladie neurologique induit des troubles du sommeil.

«L'amélioration du sommeil pourrait avoir des effets bénéfiques sur les problèmes cognitifs et émotionnels chez les patients atteints de la maladie de Huntington »

Les anomalies du sommeil et du rythme circadien ont déjà été reconnu comme des symptômes de nombreuses maladies neurodégénèratives telles que la maladie de Parkinson et la maladie Alzheimer. En effet, les troubles du sommeil sont la principale cause d’hospitalisation chez les patients atteints de la maladie d’Alzheimer. C’est probablement au moment où le patient subit ces troubles que la maladie le dépasse pour aussi affecter son entourage soignant.

De plus amples recherches sont nécessaire afin de déterminer si le manque de sommeil et les anomalies du rythme circadien font partie du répertoire complexe des symptômes attribués à la MH ou bien s’ils sont juste la conséquence indirecte de cette affection. Néanmoins, quelle qu’en est la cause, nous devrions reconnaitre que les troubles du sommeil peuvent empirer les symptômes neurologiques des patients de la MH. Les effets secondaires induits par ces troubles du sommeil pourraient être déterminant afin d’établir un plan de soin adapté aux patients. Les changements d’humeur et les pensées négatives peuvent amplifier l’impact sur la qualité de vie du patient que les autres symptômes tels que les mouvements involontaires.

Les anomalies circadiennes dans la maladie de Huntington

Le premier indice d’anomalie du sommeil ou du rythme circadien chez un patient de la MH provient d’une étude démontrant les changements subtils des profils d’activité circadienne, mesurés par un détecteur de mouvements fixé au poignet.

Les rythmes circadiens sont difficiles à évaluer précisément chez l’être humain du fait qu’ils peuvent être masqués par d’autres activités telles que le travail ou la vie sociale. Néanmoins, ils restent faciles à mesurer chez les souris et la mesure directe du rythme circadien chez une souris modèle de la MH montre clairement des perturbations de leur comportement circadien.

Ces souris ont démontré une désintégration progressive du rythme normal du cycle repos/activité. Cette perturbation a aussi été révélée chez des patients de la MH équipés de détecteurs d’activité. Chez les souris modèles de la MH, les niveaux activité des gènes qui contrôlent l’horloge circadienne dans le SCN sont altérés. Cette anomalie murine a été confirmée par trois différents laboratoires.

Plus important encore, cette découverte du trouble du rythme circadien chez les souris a été corrélée avec le déclin de leur fonction intellectuelle et la restauration de leur rythme délaie l’apparition de ce déclin.

Cela suggère que certains problèmes cognitifs chez ces souris sont causés par la perturbation du sommeil et de leur rythme circadien. Si la même chose se produit chez l’être humain, alors améliorer le sommeil et les fonctions circadiennes pourraient avoir des effets bénéfiques sur les problèmes cognitifs et émotionnels qu’expérimentent les patients de la MH.

Quelle est la cause des troubles du sommeil dans la maladie de Huntington?

Les causes les plus communes des troubles du sommeil chez les personnes sans problème neurologique sont la dépression, les stimulants à l’instar de la caféine et de la nicotine, ainsi qu’un style de vie décalé comme aller au lit tard, se lever tard et faire des siestes durant la journée. Il est probable que ces mêmes coupables soient aussi responsables des mêmes troubles du sommeil chez les patients de la MH.

Il est aussi possible que ces troubles du sommeil soient des symptômes directement liés à la MH, telle que la chorée. Des anomalies du sommeil ont été reportées chez des patients nouvellement symptomatiques sans historiques de médications and qui n’expérimentaient pas de dépression.

Les études chez les souris modèles de la MH ont aidé à comprendre les troubles du sommeil chez les patients. De manière encourageante, la restauration d'un cycle normal du sommeil chez ces souris a amélioré leur performance cognitive.
Les études chez les souris modèles de la MH ont aidé à comprendre les troubles du sommeil chez les patients. De manière encourageante, la restauration d'un cycle normal du sommeil chez ces souris a amélioré leur performance cognitive.

Nous ne savons pas encore si ces perturbations du sommeil et du rythme circadien sont causées directement par la mutation du gène « HD » ou si certains patients expérimentent ces troubles du fait d’avoir les symptômes de la MH.

Plus de recherches sont nécessaires afin de répondre à cette question. Il est néanmoins intéressant que nombre des symptômes subtils observés dans les étapes précoces de la MH soient semblables à ceux observés chez des individus en bonne santé après une privation de sommeil.

Peut-on traiter les troubles du sommeil et du rythme circadien dans la MH ?

Si vous êtes atteint de la MH, vous ne voulez pas ajouter les conséquences de la privation de sommeil à vos symptômes. Voici la bonne nouvelle : il existe déjà des traitements bien établis pour traiter les troubles du sommeil.

Si votre trouble du sommeil interfère avec votre vie quotidienne, vous devriez en parler avec votre docteur. Il ou elle est capable de prescrire un traitement qui vous aidera. Il n’est pas nécessaire que ce soit un traitement sur le long terme, Il arrive qu’un traitement de courte durée soit suffisant pour vous aider à rétablir un bon cycle du sommeil.

Si vous penser que vous pourriez être déprimés, vous devriez parler à votre docteur de cette dépression et des troubles du sommeil. La dépression est l’ennemi du sommeil mais des traitements efficaces sont disponibles.

Vous devez garder en mémoire que de nombreux médicaments peuvent causer en effets secondaires des anomalies du sommeil. Demander à votre docteur ou votre pharmacien si le traitement que vous prenez peut induire des troubles du sommeil. N’arrêtez pas de prendre votre traitement même si vous pensez qu’il interfère avec votre sommeil. Prenez toujours conseil auprès d’un professionnel de la santé avant de modifier votre traitement.

Les règles simples pour une bonne nuit de sommeil

Afin d’améliorer son sommeil, il est scientifiquement reconnu qu’il existe des stratégies simples à mettre en œuvre chez vous et présentant une efficacité égale aux médicaments. Que vous soyez une aidant ou un patient, améliorer votre hygiène du sommeil ne peut être que bénéfique.

** « Les règles simples pour une bonne nuit de sommeil » du professeur Morton ont été récemment publiées dans le journal de neurologie expérimentale. Dans la prochaine édition de ce numéro spécial sur le sommeil dans la MH, nous vous dévoilerons l’intégralité ces « règles simples » .**

Cet article est basé sur la récente "peer-reviewed" revue écrite par le Prof Morton dans Experimental Neurology, qui résume toutes les recherches publiées sur le sommeil dans la MH incluant les siennes. Pour plus d'informations sur notre politique d'information voir notre FAQ ...