Nouvelles décevantes de la compagnie Novartis au sujet du Branaplam et de l’essai VIBRANT-HD
La compagnie Novartis a annoncé qu’elle mettait fin au développement du médicament Branaplam dans le cadre de la maladie de Huntington. Ici, nous passons en revue cette dernière nouvelle et son impact sur la communauté MH.
Par Dr Rachel Harding 13 février 2023 Edité par Dr Jeff Carroll Traduit par Michelle Delabye & Dominique Czaplinski Initialement publié le 9 décembre 2022
La compagnie pharmaceutique Novartis a publié une mise à jour communautaire annonçant qu’elle mettait fin au développement du médicament Branaplam, un médicament diminuant la huntingtine, pour un possible traitement dans le cadre de la MH. Cette information fait suite aux mauvaises nouvelles récentes s’agissant des effets secondaires du Branaplam chez des patients MH testés dans la cadre de l’essai clinique VIBRANT-HD, dont le dosage avait été interrompu plus tôt cette année. Dans cet article, nous décomposerons cette annonce et ce qu’elle signifie pour la communauté MH.
Les thérapies de diminution de la huntingtine sont poursuivies en clinique par de nombreuses entreprises
De nombreuses compagnies explorent la diminution de la huntingtine en tant que stratégie de traitement de la maladie de Huntington. Cette maladie est causée par une mutation du gène huntingtin qui entraîne la production d’une version défectueuse de la protéine huntingtine. La protéine défectueuse provoque toutes sortes de problèmes au sein du cerveau, et notamment la mort des cellules nerveuses entraînant les symptômes de la MH. Les médicaments diminuant la huntingtine visent à réduire les taux de la protéine huntingtine défectueuse au sein du cerveau avec l’objectif de ralentir ou de stopper la progression de la MH.
Des traitements diminuant la huntingtine sont en cours de développement, utilisant une variété d’approches différentes, telles que les oligonucléotides anti-sens (compagnies Wave Life Sciences et Roche) ou les thérapies géniques virales (compagnie UniQure). Problème : les médicaments développés par ces compagnies ne peuvent pas se propager facilement dans tout l’organisme, de sorte qu’ils sont administrés chez les patients par perfusion dans le liquide céphalo-rachidien ou par injection directe dans le cerveau. Cette manière d’administrer les médicaments est coûteuse et exigeante pour les patients ; ce type de thérapie ne pourrait donc pas être déployé de manière triviale dans la communauté MH mondiale.
Pour surmonter ces problèmes, les chercheurs souhaitent développer des « thérapies à petites molécules » qui seraient moins chères à fabriquer et à administrer. Les médicaments à petites molécules peuvent être mis au point pour être pris par voie orale, sous forme de pilule ou de sirop, comme la plupart des médicaments courants que vous prenez peut-être déjà, tels que des analgésiques ou un médicament contre les allergies.
Dans la mesure où ils peuvent « faire du stop » dans la circulation sanguine, les médicaments à petites molécules se propagent également mieux à presque tous les organes du corps. Certains médicaments à petites molécules, mais pas tous, peuvent même faire le saut du sang au cerveau, permettant le traitement du corps et du cerveau avec un seul médicament.
Le médicament Branaplam diminue la huntingtine mais il était à l’origine mis au point pour traiter une autre maladie, l’amyotrophie spinale (SMA)
Deux compagnies différentes, Novartis et PTC Thérapeutics, testent toutes deux des médicaments à petites molécules pouvant diminuer la huntingtine chez des patients MH. Les médicaments de ces deux compagnies sont appelés des modulateurs de l’épissage car ils ciblent la façon dont nos cellules modifient les messages génétiques, un processus appelé épissage. Chaque message génétique peut être considéré comme un livre d’histoires, et lorsqu’une histoire est terminée, la dernière partie du message lit l’équivalent génétique de « la fin » pour indiquer à la cellule que la séquence pour ce message est complète. Les médicaments de modulation de l’épissage réorganisent les pages du livre d’histoire afin que « la fin »soit lue à la fin, de sorte que les cellules détruisent le message et ne produisent pas du tout la protéine associée. Tout comme vous vous débarrasseriez d’un livre qui n’aurait aucun sens s’il commençait par une fin prématurée et que vous lisiez « il était une fois, la fin ».
Le modulateur de l’épissage développé par la compagnie Novartis, appelé Branaplam, est un médicament développé initialement pour une maladie complètement différente, l’amyotrophie musculaire spinale car il modifie également les taux d’une protéine appelée SMN2, sous-tendant cette maladie. De façon tout à fait inattendue, les chercheurs de la compagnie Novartis ont découvert que le médicament Branaplam modifiait également les taux de la protéine huntingtine chez différents modèles et ont donc souhaité savoir si ce médicament pourrait être un bon traitement pour les personnes atteintes de la MH dans le cadre d’un essai appelé VIBRANT-HD.
Le médicament Branaplam a de mauvais effets secondaires chez certaines personnes traitées avec celui-ci
L’essai VIBRANT-HD visait à déterminer si le médicament Branaplam était sans danger et efficace pour diminuer les taux de la huntingtine mais, avant que le recrutement ne soit complet, le dosage a été suspendu en raison de problèmes de sécurité. La décision de suspendre l’essai a été prise par un comité indépendant de surveillance et de suivi des données qui a évalué les données générées par l’essai avant que les médecins, les patients ou le sponsor de l’étude (Novartis) ne connaissent les résultats afin de garantir la sécurité des patients en cas de problème.
Depuis, nous avons appris lors de cette annonce la plus récente que Novartis a décidé de mettre fin à tout développement du Branaplam dans le cadre de la MH, en raison de problèmes de sécurité associés à ce médicament. Lorsque le dosage avait été suspendu au mois d’août, l’information publiée indiquait qu’il y avait des problèmes concernant certains participants de l’étude avec une maladie appelée neuropathie périphérique (dommages aux cellules nerveuses à l’extérieur du cerveau et de la moelle épinière). Dans cette annonce plus récente, la compagnie Novartis a fourni des informations supplémentaires s’agissant des problèmes de sécurité observés chez de nombreux participants, mais pas tous.
Comme nous l’attendions, des symptômes et des changements dans les examens neurologiques compatibles avec une neuropathie périphérique ont été confirmés comme étant observés chez certains participants. Certains participants présentaient également une augmentation des taux des neurofilaments à chaîne légère (NfL), un test de laboratoire a été utilisé afin d’évaluer les blessures ou lésions aux cellules nerveuses, ce qui signifie qu’il peut y avoir des dommages au système nerveux après le traitement au Branaplam. L’observation d’une augmentation de la taille d’une région cérébrale appelée les ventricules est également préoccupante. Les ventricules sont un espace rempli de liquide situé profondément dans le cerveau et l’augmentation de la taille de cette région peut signifier plusieurs choses différentes pour lesquelles nous n’avons pas encore assez d’informations pour bien comprendre. La compagnie Novartis déclare, aux termes de sa lettre, qu’aucun symptôme clinique n’a été associé à ce jour à ces résultats d’analyse cérébrale.
Qu’est-ce que cela signifie pour les patients MH qui ont reçu le Branaplam ?
La compagnie Novartis a déclaré que tous les participants à l’étude qui ont reçu le médicament continueront à être surveillés. Nous ne savons pas encore si les effets secondaires ressentis par les participants à l’essai sont permanents ou s’ils s’amélioreront maintenant que l’administration du médicament est arrêtée, il est donc important de surveiller les symptômes.
Que pouvons-nous apprendre de ces essais qui se terminent ainsi ?
Des échecs d’essais, comme celui-ci, peuvent très durs et il est tout à fait normal de se sentir contrarié par ce type de nouvelles, tout particulièrement pour les membres courageux et dévoués de la communauté MH qui participent à cet essai. Malgré cette triste évolution, il y a encore beaucoup à apprendre de ces essais qui ne se déroulent pas comme nous l’espérions. Des tonnes de données sont collectées tout au long des essais et d’autres continueront à être collectées dans les mois à venir à mesure que les choses se termineront officiellement. Ces données peuvent nous apporter des informations importantes sur ce qui a pu se passer afin que la communauté puisse apprendre de cet essai et passer à autre chose. La compagnie Novartis a déclaré qu’elle s’engage à partager ce qu’elle apprend avec les familles MH, les chercheurs et autres professionnels de la communauté MH.
Savons-nous pourquoi le médicament Branaplam n’a pas agi comme nous l’espérions ?
Cette annonce est la dernière d’une série de nouvelles décevantes s’agissant des essais cliniques MH, alors que se passe-t-il ? Il est important de noter que le médicament Branaplam n’a pas été développé pour traiter la MH. Nous savions que des effets secondaires imprévus étaient possibles car en plus de diminuer la huntingtine, Branaplam modifie également les taux de la protéine SMN2, ainsi que d’autres potentiellement. La modification des taux de nombreuses protéines différentes peut perturber des processus complexes exécutés par les cellules nerveuses, ce qui pourrait expliquer certains des symptômes observés.
En fait, dans certaines études animales, la compagnie Novartis précise dans son annonce que la toxicité des nerfs était considérée comme un effet secondaire du traitement au Branaplam ; c’est pourquoi des procédures de surveillance de sécurité robustes ont été incluses dans l’essai VIBRANT-HD. Fait intéressant, les enfants atteints de la SMA traités au Branaplam ne semblent pas présenter ces symptômes ; c’est pourquoi, il y avait encore de l’optimisme quant au fait que cela ne révélait pas être problème chez les patients MH. Nous en apprendrons probablement davantage sur la raison pour laquelle cela s’est produit au fur et à mesure que davantage de données de l’essai seront compilées et analysées.
Qu’est-ce que cela signifie pour les autres médicaments de modulation de l’épissage afin de traiter la MH ?
D’autres compagnies travaillent sur le développement d’un modulateur de l’épissage pour traiter la MH, notamment le groupe Roche qui effectue des recherches précliniques dans ce domaine. Un autre essai, appelé PIVOT-HD, testera un modulateur de l’épissage, PTC-518, développé par la compagnie PTCV Thérapeutics, lequel est très semblable au Branaplam. Cet essai en cours en Europe et en Australie bien que le recrutement soit suspendu aux Etats-Unis, la société PTC devant fournir des données supplémentaires à l’agence de réglementation américaine, la FDA. Il est important de noter que le médicament PTC-158 a été spécifiquement conçu pour la MH, et les données de la compagnie PTC indiquent que ce médicament se propage plus efficacement dans le cerveau que le Branaplam, l’espoir est donc que les effets secondaires observés avec le Branaplam ne seront pas un problème pour le médicament PTC-158 ; nous en saurons davantage au fur et à mesure du déroulement de l’essai.
Quand en apprendra-t-on davantage ?
La compagnie Novartis s’est engagée à tenir la communauté informée au fur et à mesure de l’analyse des données de l’essai. HDBuzz publiera un autre article dès qu’ils auront plus d’informations concernant le médicament Branaplam ou l’essai VIBRANT-HD.
Il est important de rappeler que les essais cliniques font parties des expériences les plus importantes et les plus compliquées qu’on peut mener sans garantie de bons résultats mais chaque essai ajoute à nos connaissances et nous rapproche de le recherche de médicaments pour traiter la maladie de Huntington. Nous sommes extrêmement reconnaissants envers les membres courageux et désintéressés de la communauté MH ayant participé à cet essai.